[ [ [ ILS FONT LA GUERRE AUX SANS-PAPIERS ! - Yannis Lehuédé

Le 24 juin restera
comme un jour noir dans l’histoire du mouvement des sans-papiers en
France mais
surtout dans l’histoire du syndicalisme français.

C’est hier en effet que les
travailleurs sans-papiers isolés qui occupaient depuis bientôt 14 mois une
partie des locaux de la Bourse du travail, 85 rue Charlot, à Paris, pour
mener
une action d’ensemble visant à obtenir leur régularisation à partir d’un
« lieu ami », ont été expulsés.

Cinq jours après le
communiqué de la CGT précisant que la Bourse du travail devait être
« libérée », voilà donc la chose faite, et de la manière la plus
violente.

Une centaine peut-être de membres du
service d’ordre de la CGT, sur le coup de midi, profitant du fait que la
majeure partie d’entre nous étaient partis à notre manifestation
hebdomadaire
du mercredi, ont subitement envahi la cour, cagoulés ou masqués,
matraquant les
hommes et gazant tous les présents, femmes et enfants. Des personnes ont dû
être hospitalisés et le petit Mohamed, la mascotte de la Bourse occupée,
bien
connu de tout le monde, et une femme, viennent seulement de sortir, après 24
heures d’hôpital.

La densité des gaz était telle que
Sissoko, notre coordinateur, accouru aux cris, est tombé évanoui dans la
cour
et ce sont les femmes, réfugiées entre-temps à l’intérieur, qui sont
ressorties
pour l’y transporter à la force des bras.

Nous nous sommes barricadés dans la
grande salle, et la police est alors intervenue, appelée par des gens du
voisinage inquiets à cause des grands cris et de la fumée des lacrymogènes.

Dans un premier temps, le commissaire a
veillé à empêcher notre affrontement avec le service d’ordre de la CGT.
Celle-ci a appelé la Ville de Paris, propriétaire de l’immeuble, qui a
immédiatement (ce qui prouve qu’elle était d’accord) réquisitionné la
police.
Le commissaire nous a alors imposé l’évacuation des locaux, exigeant même,
d’après les instructions reçues, notre départ immédiat sans récupération
de nos
affaires (ce qui, par le passé, s’est souvent soldé par la perte d’effets et
documents personnels).

Nous nous sommes opposés et, appelés par
nous, nos camarades partis en manifestation sont rentrés. Le rapport de
forces
a été en quelque manière rétabli, une partie ayant pu même rentrer dans la
grande salle par l’accès du boulevard du Temple, contrôlé par nous. Le
commissaire a alors accepté de nous faire récupérer toutes nos affaires.
Cette
opération était terminée un peu après 19 heures.

Depuis, nous sommes campés sur le
trottoir du boulevard du Temple à plusieurs centaines (une liste de 600
sans-papiers présents a été dressée hier soir) et attendons que les
maires du
troisième et deuxième (qui s’y sont engagés) nous trouvent un lieu apte
à nous
héberger et surtout où nous puissions, sans être dispersés, poursuivre notre
action pour obtenir la régularisation de nous tous. Nous sommes dans
l’attente
d’un rendez-vous que nous a promis le ministère de l’immigration pour
discuter
les critères de notre régularisation. C’est maintenant le moment le plus mal
venu pour affaiblir notre mouvement et, quant à nous, de baisser les bras.

La lutte continue !

Paris, le 25 juin 2009

CSP 75

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