[ [ [ LETTRE OUVERTE À NOS PARLEMENTAIRES - Yannis Lehuédé

La Loppsi – loi d’orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure –, contient tant de dispositions que personnes n’est encore parvenu à les énumérer, et quelle demeure largement méconnue. Un de ces articles est parvenu toutefois à une relative notoriété : l’article 32terA, qui prévoit que les "habitations illicites" puissent être expulsées par simple décision administrative dans un délai de 48 heures. Leurs habitants qui n’auraient pas obéi dans le délai imparti seraient de plus passibles d’une amende de 3750 euros, et pourrait être ordonnée supplémentairement la destruction de leurs habitations avec leurs biens.

On doit à l’association Halem (des habitants de logements éphémères ou mobiles) non seulement d’avoir réussi le début de mobilisation auquel on assiste depuis plusieurs semaines à travers tout le territoire, mais l’analyse rigoureuse du 32terA contenue dans la "lettre au législateur" ci-dessous, qu’on est invité à reproduire et envoyer à qui de droit.

Faudra-t-il remercier les législateurs délirants d’avoir ainsi forcé des citoyens à plonger jusqu’aux sources du droit, pour y exhumer nombre de principes juridiques fondamentaux piétinés par la Loppsi ?

(ce projet de loi repasse maintenant au Sénat courant janvier)

Nous avons adressé la lettre suivante à tous les parlementaires. Ce projet de loi a été "débattu" en seconde lecture à l’Assemblée du 14 au 21 décembre 2010 et voté article par article. En fait, « l’affaire était pliée » dès jeudi 16 après-midi et l’article 32ter A voté, comme les autres articles, à la majorité des rares députés présents !

Le décompte des votes à l’assemblée a eu lieu en séance publique ce mardi 21 décembre (en même temps se tenaient des rassemblement de protestation à Paris et dans certaines villes ). Voici la synthèse de ce vote :

Gauche.DR : 25 contre, 1 non votant

Socialistes.RC : 159 contre, 45 non votants

Nouveau Centre : 18 pour, 1 contre, 5 abstentions, 1 non votant

UMP : 284 pour, 3 abstentions, 27 non votants

Non Inscrits : 3 pour, 2 contre, 3 abstentions

Total : 305 pour, 187 contre, 8 abstentions, 77 non votants

Vous avez été 2350 à nous faire retour de votre lettre personnalisée à votre député. Vous pouvez maintenant contrôler le vote de votre député ici et au besoin le réprimander pour ses promesses non tenues.

Le texte de loi doit maintenant repasser au Sénat courant janvier. Nous vous invitons à mettre ce délai à profit pour interpeller personnellement votre sénateur, désormais, en suivant la procédure ci dessous et à en profiter pour informer largement votre entourage de ce projet de loi scélérate que la grande majorité ignore dans un silence des médias qui en dit long.

1. Téléchargez la lettre (modifiée le 22/12 à l’intention des sénateurs) en cliquant ici et enregistrez-la dans votre ordinateur.

2. Rendez-vous sur le site du sénat et cliquez votre département sur la carte, puis sur le nom de votre sénateur qui s’affiche à droite. La page de votre sénateur s’affiche. Vous pouvez alors lui envoyer au choix :

• par courriel : cliquer sur l’adresse mél du sénateur (à gauche) pour ouvrir en rédaction d’un message votre éditeur de méls (si ça ne marche pas voir [1] puis revenir ici) et mettez en copie l’adresse association@halemfrance.org pour nous permettre d’estimer l’impact. Il ne reste plus qu’à écrire ce que vous voulez, à joindre le fichier PDF que vous venez de télécharger en pièce attachée et à envoyer. Alternativement, vous pouvez choisir de copier la lettre ci-dessous et la coller dans votre message.

• par courrier postal : imprimer le fichier que vous venez de télécharger (16 pages !) et l’envoyer par la poste (adresse postale également trouvée en bas de la page du sénateur).

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À Mesdames et Messieurs les Sénateurs de la République,

L’examen de la LOPPSI 2, loi d’orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure, est prévu au Sénat à partir de la deuxième quinzaine de janvier 2011.

L’article 32 ter A, introduit par un amendement du gouvernement adopté par la commission des lois du Sénat, puis voté par le Sénat le 10 septembre 2010, crée une procédure d’exception, expéditive et arbitraire, à l’initiative du Préfet et en l’absence du juge, pour expulser les habitants installés de manière « illicite ». Nombreuses sont les personnes qui risquent d’être concernées par cette disposition répressive. Si la procédure contradictoire est prévue dans les textes, elle est néanmoins compromise, et l’article prévoit également la destruction des biens, ainsi qu’une amende de 3750 € pour le propriétaire du terrain, public ou privé, qui s’opposerait à ces procédures arbitraires.

Article 32 ter A (Version Assemblée Nationale, deuxième lecture du 21 décembre 2010).

I. - Lorsqu’une installation illicite en réunion sur un terrain appartenant à une personne publique ou privée en vue d’y établir des habitations comporte de graves risques pour la salubrité, la sécurité ou la tranquillité publiques, le représentant de l’État dans le département, ou, à Paris, le préfet de police, peut mettre les occupants en demeure de quitter les lieux.

La mise en demeure est assortie d’un délai d’exécution qui ne peut être inférieur à quarante-huit heures. Elle est notifiée aux occupants et publiée sous forme d’affichage en mairie et sur les lieux. Le cas échéant, elle est notifiée au propriétaire ou titulaire du droit d’usage du terrain.

Lorsque la mise en demeure de quitter les lieux n’a pas été suivie d’effet dans le délai fixé et n’a pas fait l’objet d’un recours dans les conditions prévues au II, le préfet peut procéder à l’évacuation forcée des lieux, sauf opposition du propriétaire ou du titulaire du droit d’usage du terrain dans le délai fixé pour l’exécution de la mise en demeure. Le cas échéant, le préfet saisit le président du tribunal de grande instance d’une demande d’autorisation de procéder à la destruction des constructions illicites édifiées pour permettre l’installation en réunion sur le terrain faisant l’objet de la mesure d’évacuation. Le président du tribunal ou son délégué statue, en la forme des référés, dans un délai de 48 heures.

Lorsque le propriétaire ou le titulaire du droit d’usage du terrain fait obstacle à l’exécution de la mise en demeure, le préfet peut lui demander de prendre toutes les mesures nécessaires pour faire cesser l’atteinte à la salubrité, à la sécurité et à la tranquillité publiques, dans un délai qu’il fixe.

Le fait de ne pas se conformer à l’arrêté pris en application de l’alinéa précédent est puni de 3 750 euros d’amende.

II. - Les personnes destinataires de la décision de mise en demeure prévue au I, ainsi que le propriétaire ou le titulaire du droit d’usage du terrain peuvent, dans le délai fixé par celle-ci, demander son annulation au tribunal administratif. Le recours suspend l’exécution de la décision du préfet à leur égard. Le président du tribunal ou son délégué statue dans un délai de soixante-douze heures à compter de sa saisine.

III.« Est puni des mêmes peines le fait de séjourner dans le domicile d’autrui sans l’autorisation du propriétaire ou du locataire et de ne pas le quitter immédiatement à la requête du propriétaire ou du locataire. ».
Nous vous demandons de voter la suppression du 32 Ter A.

Qui peut être visé par cette procédure expéditive ?

Nous portons à votre connaissance les cas dans lesquels cet article 32 ter A pourrait être utilisé :

Les occupants d’habitats de fortune :

La frange la plus précarisée de la population, ceux qui ne peuvent se loger nulle part et sont donc contraints de s’installer sur des terrains, dans des cabanes et des tentes (bidonvilles, sans-logis vivant dans le bois de Vincennes etc).

Estimation chiffrée : selon le rapport 2010 de la FAP, ce sont 41 000 personnes qui vivent en habitat de fortune, cabanes et constructions provisoires. Par ailleurs, 509 140 personnes sont actuellement privées de domicile personnel (vivant à l’hôtel, en habitat de fortune, à l’année en camping, hébergés chez des tiers, en structure d’hébergement) et sont donc menacés d’avoir, un jour ou l’autre, recours à l’habitat de fortune.

Exemples : les SDF du bois de Vincennes, ceux qui s’installent dans des jardins publics, dans des bois etc...etc...

Les gens du voyage :

Sont potentiellement visées les installations "en réunion" sur le domaine public et privé, ainsi que le stationnement sur des terrains en propriété, plus de trois mois discontinus ou non à l’année, sans autorisation -de permis d’aménager ou de convention précaire d’occupation- (droit général) et sans le statut de terrain familial (droit dérogatoire sur population-cible).

Aujourd’hui « l’expulsion administrative » (c’est à dire celle diligentée par le Préfet sans décision de justice) est déjà possible dans toutes les communes, qu’elles aient ou non satisfait à l’obligation de réaliser des aires d’accueil et le préfet peut ordonner la saisie des véhicules, sauf les véhicules d’habitation.

Demain, au cours de « l’expulsion administrative » le préfet sera autorisé à demander la destruction des véhicules, y compris ceux d’ habitation.

Les ménages occupant des locaux et maisons construits sans permis :

Ces situations sont nombreuses en France, particulièrement dans les DOM TOM, où la majorité des maisons ont été édifiées sans permis de construire et sont donc « illicites ». Ce sont des installations « en réunion » qui tomberont sous le coup de cette loi.

Les occupants d’habitat alternatif :

Des modes d’habitat alternatif sont mis en œuvre de plus en plus fréquemment, poussés par des convictions écologiques ou les difficultés à se loger : il s’agit souvent d’habitat léger, mobile ou éphémère, respectueux de l’environnement, à faible empreinte écologique. Exemples : yourtes, tipis, cabanes, etc... A noter que de nombreuses personnes installent des yourtes ou des tipis dans leur propriété, pour leur famille : elles sont menacées de l’arbitraire là aussi par l’article 32 ter A.

Les habitants de mobile-homes :

De nombreux mobiles-homes ont été installés dans des propriétés où le plus souvent il existe des maisons. Les habitants de mobiles-homes dont l’installation n’aura pas été agréée seront soumis au même régime.

De par les pouvoirs considérables et rapides qu’il donne au Préfet, cet article ouvre un champ d’application immense, qui va bien au delà du stéréotype stigmatisant « camp de roms », qui remet en cause la protection du domicile du citoyen et la protection de ses biens.

Il crée une nouvelle discrimination concernant la protection du domicile, et traite comme des coupables ceux qui en réalité sont victimes de l’incurie de l’État en matière de logement et en matière d’accueil.

Il constitue une menace pour le droit de propriété, qui est encadré et protégé par le Droit et la Constitution.

Pouvant être mis en œuvre de manière accélérée, sans autorisation préalable du juge civil, sur décision du préfet, il constitue une mesure d’exception qu’aucun danger ne vient justifier autre que celui de ne pas trouver à se loger par ses propres moyens dans un contexte de crise grave du logement.

Cet article organise la répression de la frange la plus exclue et la plus précarisée de la population, comme les SDF, et de celle dont le mode de vie est considéré comme marginal par les institutions, et qui, en raison même de ce mode de vie, sont l’objet de discriminations (gens du voyage, occupants d’habitat alternatif…), alors même que les dispositions prévues pour permettre de diminuer les discriminations dont ces populations sont victimes en matière d’accès au logement et d’habitat (loi DALO, loi Louis Besson, procédures de péril ou d’insalubrité) sont insuffisamment appliquées.

Nous attirons votre attention sur le caractère inconciliable que constitue l’adoption de cet article avec les lois en vigueur.

En effet, ce projet de loi ne respecte ni l’esprit ni la lettre des textes et jurisprudences suivants :

A - Lois nationales concernant le logement

• Loi du 22 juin 1982

Art. 1er : Le droit à l’habitat est un droit fondamental ; il s’exerce dans le cadre des lois qui le régissent.

L’exercice de ce droit implique la liberté de choix pour toute personne de son mode d’habitation et de sa localisation grâce au maintien et au développement d’un secteur locatif et d’un secteur d’accession à la propriété ouverts à toutes les catégories sociales.

Les droits et obligations réciproques des bailleurs et des locataires doivent être équilibrés, dans les relations individuelles comme dans leurs relations collectives.

• Loi du 6 juillet 1989

Art. 1 : Le droit au logement est un droit fondamental ; il s’exerce dans le cadre des lois qui le régissent.

L’exercice de ce droit implique la liberté de choix pour toute personne de son mode d’habitation grâce au maintien et au développement d’un secteur locatif et d’un secteur d’accession à la propriété ouverts à toutes les catégories sociales.

Aucune personne ne peut se voir refuser la location d’un logement en raison de son origine, son patronyme, son apparence physique, son sexe, sa situation de famille, son état de santé, son handicap, ses mœurs, son orientation sexuelle, ses opinions politiques, ses activités syndicales ou son appartenance ou sa non-appartenance vraie ou supposée à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée.

Les droits et obligations réciproques des bailleurs et des locataires doivent être équilibrés dans leurs relations individuelles comme dans leurs relations collectives.

• Loi du 31 mai 1990

Art.1 : Garantir le droit au logement constitue un devoir de solidarité pour l’ensemble de la nation.

Toute personne ou famille éprouvant des difficultés particulières, en raison notamment de l’inadaptation de ses ressources ou de ses conditions d’existence, a droit à une aide de la collectivité, dans les conditions fixées par la présente loi, pour accéder à un logement décent et indépendant ou s’y maintenir et pour y disposer de la fourniture d’eau, d’énergie et de services téléphoniques.

• Loi du 28 juillet 1998 (article 115-1 du code de l’action sociale et des familles)

Art. 1 : La lutte contre les exclusions est un impératif national fondé sur le respect de l’égale dignité de tous les êtres humains et une priorité de l’ensemble des politiques publiques de la nation.

La présente loi tend à garantir sur l’ensemble du territoire l’accès effectif de tous aux droits fondamentaux dans les domaines de l’emploi, du logement, de la protection de la santé, de la justice, de l’éducation, de la formation et de la culture, de la protection de la famille et de l’enfance.

L’État, les collectivités territoriales, les établissements publics dont les centres communaux et intercommunaux d’action sociale, les organismes de sécurité sociale ainsi que les institutions sociales et médico-sociales participent à la mise en œuvre de ces principes.

Ils poursuivent une politique destinée à connaître, à prévenir et à supprimer toutes les situations pouvant engendrer des exclusions.

Ils prennent les dispositions nécessaires pour informer chacun de la nature et de l’étendue de ses droits et pour l’aider, éventuellement par un accompagnement personnalisé, à accomplir les démarches administratives ou sociales nécessaires à leur mise en œuvre dans les délais les plus rapides.

Les entreprises, les organisations professionnelles ou interprofessionnelles, les organisations syndicales de salariés représentatives, les organismes de prévoyance, les groupements régis par le code de la mutualité, les associations qui œuvrent notamment dans le domaine de l’insertion et de la lutte contre l’exclusion, les citoyens ainsi que l’ensemble des acteurs de l’économie solidaire et de l’économie sociale concourent à la réalisation de ces objectifs.

• Loi du 5 mars 2007

Art. 1er : (…) Droit au logement

Art. L. 300-1. − Le droit à un logement décent et indépendant, mentionné à l’article 1er de la loi no 90-449 du 31 mai 1990 visant à la mise en œuvre du droit au logement, est garanti par l’État à toute personne qui, résidant sur le territoire français de façon régulière et dans des conditions de permanence définies par décret en Conseil d’État, n’est pas en mesure d’y accéder par ses propres moyens ou de s’y maintenir.

Ce droit s’exerce par un recours amiable puis, le cas échéant, par un recours contentieux dans les conditions et selon les modalités fixées par le présent article et les articles L. 441-2-3 et L. 441-2-3-1 ;

• Le Conseil Constitutionnel - Décision n° 94-359 DC du 19 janvier 1995 :

[…] Considérant qu’aux termes du dixième alinéa du Préambule de la Constitution de 1946, "La nation assure à l’individu et à la famille les conditions nécessaires à leur développement" ; qu’aux termes du onzième alinéa de ce Préambule, la nation "garantit à tous, notamment à l’enfant, à la mère et aux vieux travailleurs, la protection de la santé, la sécurité matérielle, le repos et les loisirs. Tout être humain qui, en raison de son âge, de son état physique ou mental, de la situation économique, se trouve dans l’incapacité de travailler a le droit d’obtenir de la collectivité des moyens convenables d’existence" ;

Considérant qu’il ressort également du Préambule de la Constitution de 1946 que la sauvegarde de la dignité de la personne humaine contre toute forme de dégradation est un principe à valeur constitutionnelle ;

Considérant qu’il résulte de ces principes que la possibilité pour toute personne de disposer d’un logement décent est un objectif de valeur constitutionnelle ;

Considérant qu’il incombe tant au législateur qu’au Gouvernement de déterminer, conformément à leurs compétences respectives, les modalités de mise en œuvre de cet objectif à valeur constitutionnelle ; que le législateur peut à cette fin modifier, compléter ou abroger des dispositions législatives antérieurement promulguées à la seule condition de ne pas priver de garanties légales des principes à valeur constitutionnelle qu’elles avaient pour objet de mettre en œuvre ; […]

• La Cour de cassation, Cass. Crim., 30 mai 2000, Pourvoi n° 99-83613

Alors, d’autre part, qu’en considérant que la société d’HLM était fondée à invoquer l’inadaptation du logement à la taille et à la composition du ménage pour justifier le refus d’attribution d’un logement vacant en plein hiver à une famille démunie comprenant les parents et cinq enfants dont plusieurs en bas âge, la privant ainsi du droit à un logement décent, la cour d’appel a violé les textes visés au moyen ;

Alors, de troisième part, qu’en ne considérant pas comme discriminatoire, en tant que constituant un traitement inhumain et dégradant, le refus de relogement de la famille dans de telles conditions, la cour d’appel a violé les textes visés au moyen ;

Alors, de quatrième part, qu’en ne retenant pas le délit de discrimination tandis que les conditions de refus de relogement constituaient une atteinte au respect de la vie familiale, la cour d’appel a violé les textes visés au moyen" ;

• Cass. Crim., 22 janvier 1997, bull crim n° 31

Le domicile est le « lieu où une personne, qu’elle y habite ou non, a le droit de se dire chez elle, quel que soit le titre juridique de son occupation et l’affectation donnée aux locaux » . En ce sens, pour tous ceux qui vivent en habitat de fortune, la tente, la cabane, la yourte, et pour tous ceux qui vivent en habitat mobile, la caravane ou la voiture constitue leur seul et unique domicile, leur résidence principale, et est à ce titre protégé.

Les maisons, mobile-homes, yourtes aménagées, etc. constituant aussi une résidence principale sont bien sûr protégés.

C’est pourquoi, lorsque le domicile est constitué, il doit y avoir intervention du juge, c’est-à-dire engagement d’une procédure d’expulsion.

COMMENTAIRES

L’article 32 ter A remet en cause la protection accordée au domicile et l’égalité de traitement.

• Il permet de contourner certaines protections accordées actuellement aux occupants, notamment la trêve hivernale.

Il crée ainsi une inégalité de traitement majeure entre ceux dont le domicile sera effectivement protégé, et ceux dont le domicile ne le sera pas, une nouvelle discrimination qui vise les populations les plus vulnérables, qui pourront être chassées de leur habitat déjà ultra-précaire, y compris en plein hiver, ainsi que ceux logés dans un habitat de bonne qualité mais qui ne détiennent pas de permis de construire.

• Enfin, l’article 32 ter A prévoit l’éventualité de la démolition des habitations.

Le juge intervient alors, non plus pour protéger l’inviolabilité du domicile, comme cela a toujours été le cas, mais pour organiser sa destruction, dans le cadre d’une procédure rapide en référé.

Il y a là un risque majeur de violation du droit de propriété.

L’article 32 ter A ne permet pas la mise en œuvre des procédures de péril ou d’insalubrité :

En cas d’atteinte à la salubrité ou la sécurité publique, il existe déjà les procédures d’insalubrité et de péril, appliquées en vertu des pouvoirs de police du maire et du préfet, pouvoirs de police qui consistent à « assurer le bon ordre, la sûreté, la sécurité et la salubrité publiques. » (Art L 2212-2 du CGCT). Ces procédures sont réglementées par différentes dispositions légales, notamment le CCH, et peuvent déjà mener, en cas de péril imminent :

  • à des évacuations, très rapides
  • et à la « destruction des murs, bâtiments ou édifices quelconques lorsqu’ils […] n’offrent pas les garanties de solidité nécessaires au maintien de la sécurité publique » (CCH L 511-1).

Les procédures d’insalubrité peuvent également s’appliquer à des terrains non bâtis [2], comme cela a été le cas pendant de nombreuses années.

C’est en effet par le biais des procédures d’insalubrité (voir par exemple la Loi Vivien du 10 juillet 1970), c’est-à-dire par un traitement social prévoyant le relogement, et non par un traitement répressif chassant les sans-logis, que les bidonvilles ont été résorbés dans les années 1970.

Un détournement progressif de l’esprit de la loi Louis Besson du 5 juillet 2000.

La seconde loi Louis Besson du 5 juillet 2000 relative à l’accueil et à l’habitat des gens du voyage est également insuffisamment appliquée. Le bilan publié fin 2009 indique que seules 48 % des 42 000 places nécessaires avaient été effectivement créées.

La loi Louis Besson, déjà insuffisamment appliquée, a été, depuis plusieurs années, peu à peu vidée de sa substance, amendée par des dispositions qui contredisent son esprit initial...

La logique initiale de cette loi était d’obliger les communes à construire des aires et à accueillir effectivement les gens du voyage. Il s’agissait de renforcer les obligations des communes de plus de 5000 habitants concernant l’accueil des gens du voyage, par la création d’un schéma départemental d’accueil des gens du voyage, et par un mécanisme d’incitation financière (subvention des travaux nécessaires par l’État, la région, le département, les CAF, et majoration de la dotation globale de fonctionnement).

En cas de carence, la loi prévoyait que le préfet pouvait se substituer aux communes pour faire réaliser les aires d’accueil prévues par les schémas départementaux. Ce n’est encore jamais arrivé.

En contrepartie de cette obligation d’accueil, la loi du 5 juillet 2000 permettait aux communes ayant créé les aires d’accueil prévues par le schéma départemental, ou à celles ne figurant pas au schéma mais disposant quand même d’une aire d’accueil ou en finançant une d’interdire le stationnement des résidences mobiles sur le reste de leur territoire.

En cas de violation de cet interdit, il était prévu une procédure d’expulsion au TGI en référé à l’initiative du maire. Si le terrain n’appartenait pas à la commune, le maire ne pouvait engager cette procédure que si le stationnement était de nature à porter atteinte à la salubrité, la sécurité ou la tranquillité publiques.

Petit à petit, le nombre des communes pouvant user du droit d’interdire le stationnement et d’engager des procédures d’expulsion a été étendu :

• Aux communes appartenant à un groupement de communes inscrit au schéma départemental (LSI)

• Aux communes non inscrites au schéma départemental, même si elles n’ont pas d’aire d’accueil : expulsion des résidences mobiles installées sur des terrains privés, en cas d’atteinte à la salubrité, sécurité ou tranquillité. (création art 9-1 par la LSI)

• Aux communes bénéficiant d’un délai et à celles bénéficiant d’un emplacement agréé (Prévention délinquance 2007)

Et le nombre de personnes visées par cette procédure au TGI a également été étendu à tous les occupants de terrains visés par l’ordonnance (LSI).

Enfin, la loi prévention de la délinquance 2007 a créé une procédure exceptionnelle et administrative, qui remplace la procédure judiciaire initiale pour toutes les communes auxquelles les amendements successifs à la loi Besson avaient permis d’être à l’initiative de ces procédures d’expulsion.

En cas d’atteinte à la sécurité, salubrité ou tranquillité publique, le maire peut demander au préfet de mettre en demeure les occupants. La mise en demeure du Préfet intervient alors, avec un délai d’exécution qui ne peut être inférieur à 24h. Si les occupants ne quittent pas les lieux, le Préfet peut faire procéder à leur évacuation forcée. Si le maire ou le propriétaire s’opposent à l’évacuation, le préfet prend un arrêté les obligeant à faire cesser l’atteinte à la salubrité, la sécurité ou la tranquillité publique. Le maire et le propriétaire s’exposent à une amende de 3750 € s’ils ne font pas cesser les atteintes en question.

Parallèlement, l’article 53 de la LSI a pénalisé « le fait de s’installer en réunion, en vue d’y établir une habitation, même temporaire, sur un terrain appartenant soit à une commune qui s’est conformée aux obligations lui incombant en vertu du schéma départemental […] ou qui n’est pas inscrite à ce schéma, soit à tout autre propriétaire sans être en mesure de justifier de son autorisation […] est puni de 6 mois d’emprisonnement et de 3750 € d’amende ». Est prévue une peine complémentaire de saisie des véhicules, sauf de ceux servant à l’habitation.

Ainsi, l’esprit de la loi initiale, qui était de prévoir l’expulsion par les communes comme contrepartie de l’accueil des gens du voyage, s’est perdu, et l’article 32 ter A vient parfaire ce qui est devenu un arsenal répressif : la procédure d’expulsion exceptionnelle et administrative est complètement déconnectée de l’existence des aires d’accueil. Il ne s’agit donc plus d’organiser l’accueil des gens du voyage, mais la répression de leur mode de vie, voire son éradication : ainsi, la destruction des habitations est autorisée, ce qui n’était pas le cas jusque-là (seules les saisies étaient possibles, et la loi excluait de la saisie les véhicules d’habitation).

B – Droit international concernant le logement, l’habitat et les expulsions :

Comment le droit international protège-t-il les droits de l’homme ?

Le droit international relatif aux droits de l’homme énonce les obligations que les États sont contraints de respecter. En devenant parties aux traités internationaux, les États assument des obligations et des devoirs au titre du droit international et s’engagent à :

respecter : l’État doit se retenir d’intervenir dans l’exercice des droits de l’homme ou de les restreindre

protéger : l’État doit protéger les personnes et les groupes contre les violations des droits de l’homme

satisfaire : l’État doit prendre des mesures positives pour faciliter l’exercice des droits de l’homme.

En ratifiant les traités internationaux relatifs aux droits de l’homme, les gouvernements s’engagent à mettre en place des mesures et une législation nationales compatibles avec les obligations et les devoirs inhérents à ces traités. Le système juridique national fournit donc la protection juridique principale des droits de l’homme garantis par le droit international. Lorsque les procédures juridiques nationales ne remédient pas aux violations des droits de l’homme, il existe des mécanismes et des procédures pour traiter des plaintes individuelles et les plaintes de groupe aux niveaux régional et international et veiller à ce que les normes internationales des droits de l’homme soient effectivement respectées, mises en œuvre et appliquées au niveau local.

• La Déclaration Universelle des Droits de l’Homme, 1948

Art 13 : 1. Toute personne a le droit de circuler librement et de choisir sa résidence à l’intérieur d’un État.

2. Toute personne a le droit de quitter tout pays, y compris le sien, et de revenir dans son pays.

Art. 25 : Toute personne a droit à un niveau de vie suffisant pour assurer sa santé, son bien-être et ceux de sa famille, notamment pour l’alimentation, l’habillement, le logement, les soins médicaux ainsi que pour les services sociaux nécessaires ; elle a droit à la sécurité en cas de chômage, de maladie, d’invalidité, de veuvage, de vieillesse ou dans les autres cas de perte de ses moyens de subsistance par suite de circonstances indépendantes de sa volonté.

• Le Pacte International relatif aux Droits Économiques Sociaux et Culturels, 1966

Art. 11 : Les États parties au présent Pacte reconnaissent le droit de toute personne à un niveau de vie suffisant pour elle-même et sa famille, y compris une nourriture, un vêtement et un logement suffisants, ainsi qu’à une amélioration constante de ses conditions d’existence. Les États parties prendront des mesures appropriées pour assurer la réalisation de ce droit et ils reconnaissent à cet effet l’importance essentielle d’une coopération internationale librement consentie.

• L’Observation Générale n°4, Le droit à un logement suffisant, 1991

Ce texte définit notamment les composants du droit à un logement suffisant :

a) La sécurité légale de l’occupation.

[…] Quel que soit le régime d’occupation, chaque personne a droit à un certain degré de sécurité qui garantit la protection légale contre l’expulsion, le harcèlement ou autres menaces. Les États parties doivent par conséquent prendre immédiatement des mesures en vue d’assurer la sécurité légale de l’occupation aux individus et aux familles qui ne bénéficient pas encore de cette protection, en procédant à de véritables consultations avec les personnes et les groupes concernés.

b) L’existence de services, matériaux, équipements et infrastructures.

[…] Tous les bénéficiaires du droit à un logement convenable doivent avoir un accès permanent à des ressources naturelles et communes : de l’eau potable, de l’énergie pour cuisiner, le chauffage et l’éclairage, des installations sanitaires et de lavage, des moyens de conservation des denrées alimentaires, d’un système d’évacuation des déchets, de drainage et des services d’urgence.

c) La capacité de paiement.

Le coût financier du logement pour les individus ou les ménages devrait se situer à un niveau qui ne menace ni ne compromette la satisfaction d’autres besoins fondamentaux. Les États parties devraient faire en sorte que, d’une manière générale, le pourcentage des coûts afférents au logement ne soit pas disproportionné aux revenus. Les États parties devraient prévoir des allocations de logement en faveur de ceux qui n’ont pas les moyens de payer un logement, et des modalités et niveaux de financement du logement qui reflètent fidèlement les besoins en la matière. Conformément au principe du respect de la capacité de paiement, les locataires devraient être protégés par des mesures appropriées contre des loyers excessifs ou des augmentations de loyer excessives. […]

d) L’habitabilité.

Un logement convenable doit être habitable, en ce sens qu’il doit offrir l’espace convenable et la protection contre le froid, l’humidité, la chaleur, la pluie, le vent ou d’autres dangers pour la santé, les risques dus à des défauts structurels et les vecteurs de maladies. La sécurité physique des occupants doit également être garantie. […]

e) La facilité d’accès.

Un logement convenable doit être accessible à ceux qui y ont droit. Les groupes défavorisés doivent avoir pleinement accès, en permanence, à des ressources adéquates en matière de logement. Ainsi, les groupes défavorisés tels que les personnes âgées, les enfants, les handicapés physiques, les incurables, les séropositifs, les personnes ayant des problèmes médicaux chroniques, les malades mentaux, les victimes de catastrophes naturelles, les personnes qui vivent dans des régions à risques naturels et d’autres groupes devraient bénéficier d’une certaine priorité en matière de logement. Tant la législation en matière de logement que son application devraient prendre pleinement en considération les besoins spéciaux de ces groupes. […]

f) L’emplacement.

Un logement convenable doit se situer en un lieu où existent des possibilités d’emploi, des services de santé, des établissements scolaires, des centres de soins pour enfants et d’autres services sociaux. […] Les logements ne doivent pas être construits sur des emplacements pollués ni à proximité immédiate de sources de pollution qui menacent le droit à la santé des occupants.

g) Le respect du milieu culturel.

L’architecture, les matériaux de construction utilisés et les politiques en la matière doivent permettre d’exprimer convenablement l’identité culturelle et la diversité dans le logement.

Dans les activités de construction ou de modernisation de logements, il faut veiller à ce que les dimensions culturelles du logement ne soient pas sacrifiées […]

• L’observation générale n°7 : Le droit à un logement suffisant – expulsions forcées, 1997

Le terme "expulsions forcées" tel qu’il est utilisé par cette observation générale est défini comme l’éviction permanente ou temporaire, contre leur volonté et sans qu’une protection juridique ou autre appropriée ait été assurée, de personnes, de familles ou de communautés de leurs foyers ou des terres qu’elles occupent. L’interdiction frappant les expulsions forcées ne s’applique toutefois pas à celles qui sont opérées par la force dans le respect de la loi et conformément aux dispositions des Pactes internationaux relatifs aux droits de l’homme.

Les femmes, les enfants, les jeunes, les personnes âgées, les populations autochtones, les minorités ethniques et autres ainsi que les personnes et groupes vulnérables, souffrent plus que les autres de la pratique des expulsions forcées
. Les femmes surtout sont particulièrement vulnérables du fait de la discrimination juridique et des autres formes de discrimination dont elles sont souvent victimes concernant le droit de propriété (y compris le droit de posséder un domicile) ou le droit d’accéder à la propriété ou au logement, et en raison des actes de violence et des sévices sexuels auxquels elles sont exposées lorsqu’elles sont sans-abri.

Les mesures protectrices devant encadrer les procédures d’éviction incluent :

(a) l’opportunité d’une véritable consultation de ceux qui sont concernés

(b) une information adéquate et raisonnable de toutes les personnes concernées antérieurement à la programmation de l’expulsion

(c) une information sur les expulsions proposées, et, lorsque c’est applicable, sur le devenir de la terre ou du logement, qui doit être délivrée dans un délai raisonnable à toutes les personnes concernées.

(d) particulièrement lorsque des groupes de personnes sont impliqués, la présence d’officiels gouvernementaux ou de leurs représentants, pendant l’expulsion.

(e) l’identification de toutes les personnes qui procèdent à l’expulsion

(f) la garantie que les expulsions ne se déroulent pas pendant une période de particulière rigueur climatique ou la nuit, à moins que les personnes concernées y consentent.

(g) l’assurance de recours légaux

(h) l’apport, là où c’est possible, d’un soutien juridique pour aider les personnes qui en ont besoin à solliciter réparation auprès du tribunal.

• Les autres textes internationaux :

Les textes relatifs à l’habitat :

La Convention internationale sur l’élimination de toutes formes de discrimination raciale (N.U., 1965), la Déclaration sur le progrès et le développement dans le domaine social (N.U., 1969), la Déclaration de Vancouver sur les établissements humains (N.U., 1976), la Déclaration sur le droit au développement (N.U., 1986), le programme d’actions du développement durable appelé Action 21 ou Agenda 21 (« tous les pays devraient aider les pauvres à se procurer un logement en adoptant des codes et règlements et en s’employant activement à régulariser et à améliorer les établissements spontanés. » in chapitre 7-Rio 1992 ), la Convention d’Istanbul sur les établissements humains dite "Habitat II" (1996), qui reconnaît « deux thèmes de dimension mondiale, aussi importants l’un que l’autre : "un logement convenable pour tous" et "le développement durable des établissements humains dans un monde de plus en plus urbanisé" ».

Les textes relatifs à une catégorie spécifique :

Les réfugiés (O.I.T., 1951), les enfants (N.U., 1959, 1989), les travailleurs (O.I.T., 1961), les femmes (N.U., 1979), les travailleurs âgés (O.I.T., 1980), les travailleurs immigrés (O.I.T., 1990), les minorités (N.U., 1991), les peuples indigènes (N.U., 1993), sont autant de catégories à qui un droit à un logement convenable ou décent a été reconnu.

• La Convention Internationale des Droits de l’Enfant (1989).

• La Convention relative au statut des réfugiés (1951).

• La Convention internationale sur la protection des droits des travailleurs migrants et des membres de leurs familles (1990).

• La Déclaration des Droits du Déficient Mental de l’AG de l’ONU, résolution 2542 (XXIV) du 11 Décembre 1975.

• La Déclaration de Vancouver sur les établissements humains adoptée par la Conférence des Nations Unies sur les établissements humains en 1976.

• La Stratégie Globale du Logement jusqu’en l’An 2000 adoptée par l’Assemblée Générale de l’ONU dans sa résolution 43/181 du 20 Décembre 1988.

• La Conférence des Nations Unies sur l’Environnement et le Développement (UNCED) de Rio de Janeiro en 1992, qui a adopté l’Agenda 21.

• La recommandation n°115 de l’Organisation Internationale du Travail, sur le logement des travailleurs de 1961.

C - Lois européennes concernant l’exercice du droit au logement :

Selon Le Commissaire aux Droits de l’Homme du Conseil de l’Europe (Colloque DALO Lyon 1er/12/09), de manière générale, exercer un droit au logement peut être défini comme le droit de vivre quelque part en sécurité, en paix et dans la quiétude ; on peut considérer que le droit au logement désigne aussi un ensemble de droits multiples ayant à faire au logement décent et aux conditions de vie suffisantes.

Les textes :

• La Convention Européenne de Sauvegarde des Droits de l’Homme, 1950

Art. 8 : Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d’une autorité publique dans l’exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu’elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l’ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d’autrui.

Protocole n°1. Article premier – protection de la propriété : Toute personne physique ou morale a droit au respect de ses biens. Nul ne peut être privé de sa propriété que pour cause d’utilité publique et dans les conditions prévues par la loi et les principes généraux du droit international.

Les dispositions précédentes ne portent pas atteinte au droit que possèdent les États de mettre en vigueur les lois qu’ils jugent nécessaires pour réglementer l’usage des biens conformément à l’intérêt général ou pour assurer le paiement des impôts ou d’autres contributions ou des amendes.

La Convention Européenne des droits de l’Homme contient de nombreuses dispositions contribuant de manière indirecte à l’attribution des droits au logement. L’article 2, droit à la vie, peut s’appliquer dans les affaires où un logement ne répond pas aux exigences de sécurité et de santé.

L’État a également obligation positive au titre de l’article 3 de fournir une protection contre les traitements inhumains ou dégradants, et également pour ce qui est des conditions de vie ou de logement .

• La Charte Sociale Européenne Révisée

Art. 30 : En vue d’assurer l’exercice effectif du droit à la protection contre la pauvreté et l’exclusion sociale, les Parties s’engagent :

• à prendre des mesures dans le cadre d’une approche globale et coordonnée pour promouvoir l’accès effectif notamment à l’emploi, au logement, à la formation, à l’enseignement, à la culture, à l’assistance sociale et médicale des personnes se trouvant ou risquant de se trouver en situation d’exclusion sociale ou de pauvreté, et de leur famille ; (…)

Art. 31 : En vue d’assurer l’exercice effectif du droit au logement, les Parties s’engagent à prendre des mesures destinées :

1. à favoriser l’accès au logement d’un niveau suffisant ;

2. à prévenir et à réduire l’état de sans-abri en vue de son élimination progressive ;

3. à rendre le coût du logement accessible aux personnes qui ne disposent pas de ressources suffisantes.

Cet article 31 doit être mis en œuvre sans discrimination, conformément à l’article 2 de la charte.

Les articles 6 : droit à un procès équitable, article 13 : droit à un recours effectif, et article 14 : interdiction de discrimination de la Convention européenne, s’appliquent également aux articles relatifs au logement, de façon indirecte.

Application : les États se doivent d’appliquer pleinement les droits relatifs au logement en recourant à tous les moyens possibles, néanmoins les États ont une certaine marge d’application pour décider de la forme et des méthodes retenues pour cette mise en œuvre, leur application doit tenir compte des caractéristiques du système administratif et juridique de chaque pays et de tout autre élément pertinent, même si les facteurs économiques telles que les contraintes extérieures peuvent limiter les capacités des pouvoirs publics à remplir leurs objectifs, les obligations de l’État restent les mêmes, même en période de récession.

En principe, la réalisation de ces objectifs exige l’adoption d’une stratégie nationale de logement, assortie de sous-objectifs, et d’un suivi effectif de la situation. Les obligations doivent être dûment prises en compte dans l’ordre juridique interne.

Les individus victimes d’un déni de logement doivent avoir accès à des voies de recours ou à des moyens de réparation, enfin, des moyens doivent être mis en place pour que les gouvernements puissent répondre de cette action.

Contrairement à ce qu’on laisse parfois entendre, ni la nature ambitieuse des obligations contractées en matière de logement, ni l’aspect économique et social des droits correspondants n’entrave la possibilité de rendre ces droits justiciables dans les systèmes de droit interne, qu’ils soient ou non dotés d’un régime juridique comprenant déjà des droits constitutionnels du justiciable en matière de logement, tous les États devraient adopter une législation spécifique clarifiant la manière dont les droits garantis par le droit international sont rendus effectifs par les juridictions ; ils doivent par exemple légiférer sur la garantie de maintien dans les lieux, ou sur un droit de logement des sans-abri, ces mesures seront particulièrement importantes dans les pays où les obligations internationales ne sont pas appliquées.

La capacité de recours individuel permet aux individus de protéger eux-mêmes leurs droits et renforce les chances de détecter les infractions et la probabilité d’apporter une solution.

Dans ses conclusions de 2005, le Comité a conclu déjà que la situation de la France n’était pas conforme à l’article 31-3 de la Charte révisée, à raison d’une offre manifestement insuffisante de logements sociaux ; ensuite deux réclamations collectives portées en 2006 contre la France ont donné au Comité l’opportunité de préciser leur jurisprudence en clarifiant la portée de l’article 31 : il a souligné que les États-parties ont une obligation pour que la situation puisse être jugée conforme à la charte, en plus de mettre en œuvre des moyens propres à permettre :

a/ de progresser réellement vers la réalisation des objectifs signés par la charte, mais

b/ de tenir des statistiques dignes de ce nom, permettant de confronter besoins, moyens et résultats,

c/ de procéder à une vérification régulière de l’effectivité et des stratégies arrêtées,

d/ de définir les étapes et de ne pas reporter indéfiniment les performances,

e/ et d’être particulièrement attentif à l’impact des choix opérés pour eux sur l’ensemble des catégories des personnes concernées et singulièrement celle dont la plus vulnérable et la plus importante.

Il a constaté à l’unanimité, et c’était avant le DALO, qu’il y avait des violations de l’article 31 de la charte révisée à raison :

1/ du progrès insuffisant concernant l’éradication de l’habitat indigne, et le manque d’infrastructures adéquates pour un grand nombre de ménages,

2/ de l’application non satisfaisante de la législation en matière de prévention des expulsions, et le manque de dispositifs permettant de proposer des solutions de relogement aux familles expulsées,

3/ de l’insuffisance des mesures qui sont actuellement en place pour réduire le nombre de sans- abri autant d’un point de vue quantitatif que qualitatif,

4/ de l’insuffisance de l’offre de logements sociaux accessibles aux populations modestes,

5/ du dysfonctionnement du système d’attribution des logements sociaux ainsi que des voies de recours itératifs,

6/ et combiné avec l’article 2, suite à discrimination, à raison de la mise en œuvre insuffisante de la législation relative aux aires d’accueil des Gens du Voyage.

• Le Traité d’Amsterdam

Art. 13 : En vue d’assurer l’exercice effectif du droit à la protection contre la pauvreté et l’exclusion sociale, les Parties s’engagent :

• à prendre des mesures dans le cadre d’une approche globale et coordonnée pour promouvoir l’accès effectif notamment à l’emploi, au logement, à la formation, à l’enseignement, à la culture, à l’assistance sociale et médicale des personnes se trouvant ou risquant de se trouver en situation d’exclusion sociale ou de pauvreté, et de leur famille ;…

Article 136 : La Communauté et les États membres, conscients des droits sociaux fondamentaux, tels que ceux énoncés dans la Charte sociale européenne signée à Turin le 18 octobre 1961 et dans la Charte communautaire des droits sociaux fondamentaux des travailleurs de 1989, ont pour objectifs la promotion de l’emploi, l’amélioration des conditions de vie et de travail, permettant leur égalisation dans le progrès, une protection sociale adéquate, le dialogue social, le développement des ressources humaines permettant un niveau d’emploi élevé et durable et la lutte contre les exclusions.

À cette fin, la Communauté et les États membres mettent en œuvre des mesures qui tiennent compte de la diversité des pratiques nationales, en particulier dans le domaine des relations conventionnelles, ainsi que de la nécessité de maintenir la compétitivité de l’économie de la Communauté.

Ils estiment qu’une telle évolution résultera tant du fonctionnement du marché commun, qui favorisera l’harmonisation des systèmes sociaux, que des procédures prévues par le présent traité et du rapprochement des dispositions législatives, réglementaires et administratives.

• Charte Européenne des Droits Fondamentaux, 2000

Art. 34.3 : Afin de lutter contre l’exclusion sociale et la pauvreté, l’Union reconnaît et respecte le droit à une aide sociale et à une aide au logement destinées à assurer une existence digne à tous ceux qui ne disposent pas de ressources suffisantes, selon les modalités établies par le droit communautaire et les législations et pratiques nationales.

• L’agenda pour la politique sociale de l’Union Européenne

"… Le modèle social européen, caractérisé en particulier par des systèmes de protection sociale de haut niveau, par l’importance du dialogue social, et par des services d’intérêt général, dont le champ couvre des activités essentielles à la cohésion sociale, repose aujourd’hui, par delà la diversité des systèmes sociaux des États membres, sur un socle commun de valeurs."

« … Tous les États Membres reconnaissent l’importance de l’accès à un habitat décent, comme condition essentielle à l’intégration sociale et à la participation à la société. … Quand il s’adresse aux tranches à bas revenus de la société, le marché connaît des performances moins satisfaisantes dans la plupart des États Membres et ce phénomène se renforce. La décroissance du volume de logements à prix abordables aux premiers échelons du marché de l’habitat tend à pousser un nombre croissant de ménages au faible pouvoir d’achat vers les segments résiduels du marché.

Dans ce segment, la qualité de l’habitat est médiocre et déclinante, manque d’éléments de confort de base et le rapport qualité/prix est généralement mauvais en raison de la forte pression de la demande.

Les nouvelles formes précaires d’habitat se traduisent par la généralisation de la location meublée ou sur-occupée, les squats d’immeubles, de gares ou autres espaces publics, et les formes d’habitat informels comme les caravanes, cabanes, bateaux et garages.

Vu l’importance des dépenses liées à l’habitat dans le budget total des ménages (en moyenne 25% dans l’Union Européenne) les hausses de loyer ont un effet particulièrement assommant sur les ressources résiduelles des ménages à bas revenu, qui les repousse souvent loin en dessous du seuil de pauvreté. … »

(Conclusion de la Présidence, Conseil Européen de Nice, 7,8 et 9 décembre 2000 annexe 1. para.11)

La Commission Européenne a engagé le 29/9 une procédure contre la France, pour non-conformité avec la loi européenne concernant la libre circulation des personnes.

•••••••••••••

MESDAMES ET MESSIEURS LES SÉNATEURS DE LA RÉPUBLIQUE,

MERCI DE VOTRE ATTENTION, ET D’EXERCER VOTRE DISCERNEMENT ET VOTRE DEVOIR DE MÉMOIRE.

MERCI DE VOUS RAPPELER QUE LA SÉPARATION DES POUVOIRS, OU PLUTÔT L’ÉQUILIBRE ENTRE LES POUVOIRS LÉGISLATIF ET EXÉCUTIF, ET L’AUTORITÉ JUDICIAIRE EST ENCORE D’ACTUALITÉ ET A PLEINEMENT VALEUR CONSTITUTIONNELLE.

MERCI D’APPRÉCIER LES FAITS ET NOTRE DEMANDE À LA HAUTEUR DE LA GRAVITÉ DE LA SITUATION.

Collectif pour la suppression de l’article 32 ter A de la LOPPSI 2.

Notes

[1] méthode manuelle 1/clic droit sur l’adresse du sénateur, 2/clic gauche dans le menu qui s’ouvre sur "copier l’adresse électronique", 3/ouvrir votre éditeur de méls pour écrire un nouveau message, 4/coller l’adresse du député dans le champ destinataire.

[2] Les procédures d’insalubrité peuvent s’appliquer à un « immeuble, bâti ou non, vacant ou non, attenant ou non à la voie publique, un groupe d’immeubles, un îlot ou un groupe d’îlots [qui] constitue, soit par lui-même, soit par les conditions dans lesquelles il est occupé ou exploité, un danger pour la santé des occupants ou des voisins » art 1331-26 Code Santé Publique

[Source : Halem]

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