La visite à Mayotte du Président et d’un imposant cortège de
ministres et de journalistes est annoncée pour lundi 18 janvier
après-midi. Pour un accueil à la hauteur, ce jour sera férié. Les
Mahorais seront nombreux à l’acclamer malgré certains esprits chagrins
qui s’inquiètent de la perspective d’un département sans égalité
économique notamment dans le domaine des droits sociaux.
Il est un domaine sur lequel le Président aura tout lieu de
féliciter la préfecture de Mayotte et les forces de police ou de
gendarmerie. Depuis 2006, les chiffres assignés à cette île de moins de
200 000 habitants par les ministres de l’intérieur successifs en terme
d’éloignements des personnes qualifiées de « clandestines » ont été
dépassés : 16 000 par an en moyenne dont 2 à 3000 enfants ; pour les
trois premiers trimestres de 2009, la préfecture annonçait 14 449
personnes éloignées dont 12 201 adultes et 2 248 enfants, laissant
prévoir pour 2009 un score d’au moins 18 000 éloignements. L’État
français n’a d’ailleurs pas lésiné sur le financement de Mayotte en la
matière : effectifs de la police et de la gendarmerie presque triplés
en cinq ans et richement dotés, trois radars bientôt quatre, quatre
vedettes surveillant la circulation des frêles barques (les
« kwassas ») qui transportent les migrants. Il sera sans doute aussi
question de la construction, annoncée à plusieurs reprises, d’un centre
de rétention plus conforme aux normes que l’actuel, qualifié
d’« indigne de la République » (http/www.migrantsoutremer.org/Avis-de-la-Commission-nationale-de class="spip_in">) en avril par la Commission nationale de déontologie de la sécurité.
Mais ceux qui sont indûment considérés comme « étrangers » se
tiendront à l’écart comme ils sont contraints de le faire au quotidien
pour éviter les contrôles ou interpellations systématiques. Il s’agit
surtout de Comoriens dont les liens étroits culturels et familiaux avec
la population de Mayotte sont trop étroits pour qu’ils puissent être
qualifiés d’« étrangers ». Comme l’attestent plusieurs études une bonne
part d’entre eux vivent et travaillent à Mayotte depuis plus de dix
ans, mais l’obtention d’un titre de séjour est un parcours presque
impossible. Il s’agit aussi des nombreux Mahorais qui ne sont pas
à obtenir des preuves de leur nationalité française. Les
« rafles » dont ils sont victimes sont suivies d’un éloignement
expéditif que permet une législation dérogatoire les privant d’un
recours suspensif ; ils sont alors souvent contraints à prendre le
risque d’un retour en kwassa pour retrouver leurs enfants, suivre un
traitement médical ou, plus généralement, renouer avec leur vie établie
à Mayotte. Le 24 novembre onze rescapés repérés par un pêcheur après
avoir nagé pendant 36 heures ont témoigné de la réalité de ce drame.
Pour aider le Président et sa délégation à appréhender cette réalité
dans l’avion à défaut de le faire sur place, plusieurs associations
œuvrant à Mayotte en faveur de l’accès aux droits de tous ont établi un
dossier sous la forme de fiches présentant leurs observations
respectives (voir ci-dessous). Ce dossier, joint à ce communiqué, nous a semblé utile à
la presse qui rendra compte de cette visite éclair.
Le « Pacte pour la départementalisation » proposé aux Mahorais avant
le référendum du 29 mars 209 parlait d’inventer « un nouvel avenir qui
inscrira pleinement Mayotte dans sa géographie ». Cela semble bien peu
compatible avec la folie et la violence d’une politique sécuritaire
coupant de fait cette petite île de son milieu naturel et historique.
Mamoudzou, 15 janvier 2010
Signataires :
> Collectif Migrants Mayotte : CCCP (coordination pour la concorde, la convivialité et la paix), la Cimade, Gisti, Médecins du Monde, RESFIM (Réseau éducation sans frontières, île de Mayotte), Solidarité Mayotte ;
> Ligue des droits de l’homme (section Mayotte) et Secours Catholique (délégation Mayotte)
Télécharger le dossier au format PDF :
Plan :
1. La Cimade Mayotte : interrogations et inquiétudes sur le respect du droit des étrangers à Mayotte
Contact : Flore Adrien 06 39 69 46 10 ou 06 39 69 63 55
2. Médecins du Monde Mayotte : problèmes d’accès aux soins à Mayotte et témoignages
Contacts :
- Patrick Villedieu, coordinateur général, 06 39 69 61 61, 02 69 60 72 89, medecinsdumonde.mayotte@yahoo.fr
- Marie-Pierre Auger, responsable de mission, mpauger@wanadoo.fr
3. Resfim : Plus de 6000 mineurs isolés dans les rues de Mayotte...
Contact : Léo Kichenamassy, président, 02 69 60 32 14
4. Solidarité Mayotte : Précarité extrême pour les demandeurs d’asile à Mayotte
Contacts : Véronique Castany, responsable légal. 02 69 64 35 12 ou 06 39 09 09 83 solidarite-mayotte@orange.fr
5. Communiqué interassociatif du 2 décembre 2009 : A Mayotte, nouvelles victimes de la guerre menée par le France aux "non-Mahorais".
6. Pour en savoir plus