[ [ [ On s’abrite dans les caves de l’antiquité - Yannis Lehuédé

L’article du New York Times ci-dessous raconte comment on été récupérées d’innombrables caves abandonnées depuis l’antiquité, dont on ne sait si elles servaient de de lieux de stockage ou de cryptes religieuses. Aujourd’hui, elles sont toutes habitées, dernier refuge contre la violence du ciel qui fait qu’on peut voir sa maison pulvérisée à tout moment, en Syrie.

On voyait récemment aussi les ateliers de fabrication d’armes, improvisés par les insurgés, héritiers manifestes du savoir faire millénaire des artisans de Méditerranée. Comme les réfugiés héritent des plus anciennes caves.

Et c’est probablement là que réside le secret de cette incroyable force du peuple syrien qui parvient à résister depuis deux ans contre l’État moderne surarmé.

Mais nous aurons choisi de reproduire ci-dessous l’article du New York Times (en anglais), simplement pour les propos qu’il rapporte d’un père de famille habitant une de ces grottes :

"Comme on dit souvent en Syrie, lorsque les gouvernements occidentaux se refusent à livrer des armes à l’opposition ou n’envoient que de l’aide limitée, ils ne font que collaborer avec l’Iran, la Russie et la Chine à la destruction de la Syrie."

"Et après ils nous invitent à des conférences d’Amis de la Syrie", dit-il ce survivant de la guerre, en faisant référence aux groupes français et américains qui prétendent vouloir soutenir l’opposition. "Quel genre d’amis sont-ils ?"

On en a une idée dans un article du journal de Beyrouth, l’Orient-le Jour, qui aura bénéficié d’une "source au Quai d’Orsay" pour avoir un aperçu sur les "idées" qu’on aurait à Paris pour soutenir l’opposition syrienne. Où l’on voit que le prétexte avancé pour ne pas livrer des armes au risque qu’elles tombent entre les mains d’islamistes n’est aucunement fondé puisqu’on aurait identifié depuis longtemps comment faire pour renforcer l’opposition démocratique sans en passer par les brigades islamistes.

Est confirme au passage que de soutien qu’on dit apporté par le Qatar n’a en fait eu aucune réalité, à la différence de ce qui s’était passé en Libye, où c’était en fait des armes françaises qui passaient par ce canal, apprend-on.

Ce qu’on comprend grâce à ces confidences diplomatiques, c’est que le gouvernement français se hâte le plus lentement possible pour tenir les engagements annoncés par Hollande et Cameron ces dernières semaines.

On a des détails aussi sur l’engagement de la CIA. De même, les services américains travailleraient à identifier les destinataires d’une aide éventuelle. Plus encore est mentionné une opération qui serait plus sérieuse si elle se confirmait, de formation d’opposants syriens en Jordanie, assurée conjointement par les services américains, français anglais et jordaniens. Ainsi aurait commencé une fourniture d’armes à des "groupes rebelles non islamistes". Inch Allah, dira-t-on.

En attendant, il n’en reste pas moins qu’il serait plus efficace de mettre en place une zone d’interdiction aérienne, un chemin certainement plus court vers la fin de la guerre.

Au contraire, au train où vont les choses, on peut se laisser aller à imaginer que l’équipement de la guerrilla pourrait bien surtout servir pour l’après-guerre et l’éventuelle deuxième guerre civile à venir entre démocrates et islamistes...

Le chef d’état major de l’Armée syrienne libre s’est rendu à Bruxelles, début mars, pour supplier que de l’aide en armes et en munitions soit acheminée. On trouvera ci-dessous deux articles de la presse belge qui rendent compte de ses déclarations. Aucune autre source de la presse internationale n’apparait au résultat de la recherche de google, comme s’il s’agissait d’une information locale belge… Désintérêt qui montre combien on est pressé d’apporter de l’aide…

Ce que le général en chef de l’ASL expose est simple pourtant, et plutôt "rassurant" pour tous ceux qui, comme Barack Obama, fantasment sur les terroristes d’Al Quaeda. Rassurant, mais seulement à moitié, car le général ne cache qu’en attendant les milices islamiques, mieux équipées du Front Al Nosra, bénéficient des renforts de tous ceux qui souhaitent se battre efficacement.

Avec les moyens d’agir, l’ASL se fait fort de renverser Assad "en moins d’un mois", dit-il. "N’attendez pas qu’il soit trop tard", déclarait le général Idriss aux parlementaires européens dubitatifs.

Hier encore, Assad promettait de "nettoyer la Syrie".

La photo qui illustre cet article nous aura intrigué en raison de sa légende : "À Alep, après neuf mois de combats, la vie reprend ses droits" qui donne aussi son titre à une dépêche de l’AFP qu’on trouvera en fin de la revue de presse ci-dessous.

Si la photo est ambigue, l’article ne l’est pas moins, où l’on voit comment on s’habituerait à tout. Pour le coup on peut être "rassurés" sur la vie, et vérifier que sa splendeur subsiste, même au fond de l’horreur. On se souvient avoir lu comment Primo Levi a pu montrer qu’il y avait aussi une vie à Auschwitz. Mais convenons qu’on s’imagine plus facilement à Alep, aller faire ses courses aux échoppes dans la rue qui non seulement regorgeraient de denrées, mais où celles-ci n’auraient multiplié leurs prix que par 2,5.

Bonne nouvelle. Au début des bombardements, la ville était si tétanisée que la résistance avait dû prendre en main les boulangeries. La crise alimentaire était sévère. Six mois plus tard, l’AFP nous décrit une ville qui a réussi à s’organiser dans la guerre, déployant tout le savoir faire de millénaires de commerce, tout comme l’artisanat le plus archaïque, le plus rodé du monde, aura su improviséer une industrie d’armements pour le peuple insurgé, ou comme les caves antiques auront été redécouvertes, nettoyées, restaurées en somme, pour y vivre.

Survive le peuple de Syrie !

Paris s’éveille

Jammed in Roman Caves, Ducking Syria’s War

Some Syrian families in rebel-held areas are waiting out the violence of the civil war in abandoned Roman caves.

March 23, 2013

SARJAH, Syria — Abdulkader Darwish did not go far after a Syrian military aircraft dropped a bomb near his house last year, prompting him to gather his family and flee. He ventured with a shovel into the local olive groves. There he dug through the sealed entrance to an abandoned Roman cave.

Nine months on, dozens of members of the extended Darwish family have passed a cycle of the seasons crowded together in the damp and almost unlighted space. They have gained neighbors all the while, residents of a subterranean community in Syria’s northwest.

“There are many caves here, a line of caves, like an ancient village,” Mr. Darwish said as he huddled with several children inside. “All of them have been cleaned and are now occupied. There is not a vacant cave.”

As the bloody civil war between the government of President Bashar al-Assad and the opposition enters its third year, and Mr. Assad’s military continues to pound neighborhoods aligned with the rebels, uncountable Syrian families are waiting out the violence in the caves of bygone times. They are part of the four million people who the United Nations estimates have been forced by the war from their homes, a displacement that seemingly grows each week.

They live a grim existence — a routine of trying to eat, to stay warm and dry, to gather firewood and water out in the elements, all while listening for the sounds of incoming planes and artillery shells.

Explanations of the origins of these underground shelters, many of which are set among other Roman ruins, vary from squatter to squatter. Some say they once were pens for livestock. Others say they were temporary quarters, occupied while more impressive dwellings were built in the centuries before Jesus. Perhaps some were crypts.

Whatever the intention of those who first dug them, Syria’s caves have become essential once more, restored to modern use because their thick walls offer a chance of survival to a population under fire.

Villagers in Idlib Province talk of tens of thousands of people living this way. While these numbers are unverifiable, there are signs that cave demand exceeds cave supply, as more people lose their homes or take flight.

“This was the only cave I could find when I came here,” said Ahmed Sheikh, 51, whose family lives in a smaller cave than the Darwish family’s four-room warren, and slightly farther uphill.

In other towns across the province, part of the population remains at home. In those places, some families rely on caves only as temporary bomb shelters, places to rush to during danger. Their shelters vary from holes freshly chipped under stone ledges to deep basementlike rooms, known as beli, where food and animal feed would normally be stored beneath a villager’s home.

For those lucky enough to have them, the temporary shelters can be stocked with hanging kerosene lamps, blankets and bedrolls, offering families a place to pass the most dangerous hours or nights.

But in many villages, as in Sarjah, which the government has punished with what seems a special fury, the dangers are of a different order. People have moved from village centers into rural caves full-time. They have no plans to leave until Mr. Assad’s military is weakened to the point that its ordnance can no longer regularly reach their former neighborhoods.

“It became impossible to live in the village without being exposed to the possibility of your death at any time,” Mr. Sheikh said.

He spent 35 days improving his cave after claiming it last summer. He installed a wood-burning box stove, cut a ventilation hole, dug and hauled away mud, and hung heavy blankets to reduce drafts and create one area warmer than the rest.

His family is fastidious. The warmest room is neat, and shoes are stacked at its edge. “I keep it organized,” he said.

Cleanliness alone cannot keep away the hardship. After enduring the winter, he said, his wife’s legs are swollen. Their three young children suffer from chest infections and earaches.

As he spoke, a sluggish black beetle, about the half the size of his thumb, slid off the wall and came to rest on its back beside his feet.

Mr. Sheikh picked up the insect and threw it toward the cave’s entrance, like a stone.

“Now you have seen with your own eyes how we are forced to live,” he said.

Artillery boomed intermittently from a brick factory that Mr. Assad’s army occupies on the lowlands of Idlib’s plain. Soldiers were firing into the mountain towns, seats of the armed opposition that have given rise to well-known rebel commanders.

“Our situation is like the man who is lost at sea,” he said. “He finds a stick and holds onto it as long as he can. But we have lost 25 people already. If the situation continues, you will not find anyone in the entire Sheikh family.”

Another inhabitant of one of Sarjah’s many caves, Ibrahim Haj Musa, 50, stood near a damp stone column in the darkness and vented his disgust at the outside world, blaming the United Nations and the West for doing little to alleviate Syria’s suffering. As is common in Syria, he said that when Western governments withhold weapons from the opposition and send in only limited aid, they are essentially collaborating with Iran, Russia and China in the destruction of Syria.

“And then they invite us to the Friends of Syria conferences,” he said, of the French- and American-led multilateral group that has vowed to support the Syrian opposition. “What kinds of friends are these?”

At the entrance to the first cave, Ahmed, 15, one of Mr. Darwish’s sons, had chiseled an Arabic word into the slab of stone above the cave’s door. His work had given their cave a name. “Home,” the inscription read.

Mr. Darwish spoke of the label with resignation. “Animals, like wolves, refuse to live in such places,” he said. “But we have to accept this.”

Uphill, rocks had been stacked to form the walls of a small outhouse. A hanging blanket served as its door, concealing an open trench.

Farther on, past another cave from which several children peered out, Aziza Sheikh, one of Mr. Sheikh’s relatives, draped laundry over a rope in the open air.

Inside the cave, Yousef Sheikh, 5 months old, slept in a tiny hammock. His mother had spent the last months of her pregnancy in this cave, and left the cave to deliver the infant in an aid station, Ms. Sheikh said.

She returned with the infant hours after his birth, Ms. Sheikh said, and was raising her baby here, beneath the ground.

[Source : New York Times]

Les idées de Paris sur une aide militaire à l’ASL

23/03/2013

Face aux inquiétudes suscitées à Paris sur les risques d’une fourniture de matériel militaire français et anglais à l’opposition syrienne, une source proche du Quai d’Orsay a tenu officieusement des propos rassurants, affirmant que la France peut compter sur des alliés sérieux au sein de l’opposition syrienne tels que le général Sélim Idriss, chef d’état-major des groupes insurgés. Cette source assure que Paris possède des assurances sur le fait que l’armement qui sera fourni par la France et d’autres alliés européens ne passera pas à des mouvements jihadistes tels que le Front al-Nosra et des groupuscules qui gravitent autour de lui.

Des responsables français qui suivent de près les développements de la situation en Syrie estiment par ailleurs que les réserves européennes sur la destination réelle d’armes moyennes sophistiquées s’atténueront progressivement ; ils reconnaissent cependant que l’opposition armée syrienne est encore loin d’être structurée, mais que les choses à cet égard évoluent dans le bon sens.

Le pire, ajoutent ces sources, serait de laisser les choses telles qu’elles se présentent aujourd’hui et que les affrontements sur le terrain continuent à prendre l’aspect d’un combat sans merci entre une dictature et des mouvements jihadistes. Elles ajoutent qu’une fourniture d’armes à l’opposition serait de nature à rehausser le moral de l’opposition et que de ce fait un plus grand nombre d’officiers de l’armée régulière se joindront aux insurgés, ne serait-ce que du fait d’un effet psychologique encourageant.

Établissant une distinction entre ce qui s’est passé en Libye et les événements actuels en Syrie, un diplomate à la retraite a relevé, par ailleurs, qu’en Libye, Paris avait demandé au Qatar de convoyer le matériel français jusqu’au champ de bataille, alors que dans le cas syrien, le commandement militaire français estime qu’il est capable de traiter directement avec l’Armée syrienne libre précisant qu’il s’agirait d’un matériel « non létal » conformément à la résolution européenne adoptée à ce sujet fin février. Ce diplomate a ajouté que dans le cas de la Syrie, l’expression « aide technique » serait comprise en France dans son sens le plus large...

[Source : l’Orient-le Jour]

Les rebelles s’emparent d’une base militaire aérienne dans le Sud

Les rebelles syriens se sont emparés samedi d’une importante base aérienne de la province de Deraa, près de la frontière jordanienne, après deux semaines de combats, a annoncé l’Observatoire syrien des droits de l’Homme (OSDH).

"Les combattants de l’opposition appartenant (au groupe jihadiste) du Front al-Nosra, à la Brigade Yarmouk (de l’Armée syrienne libre, ALS) et à d’autres groupes se sont emparés de la base aérienne 38 près de la ville de Saïda, sur la route reliant Damas à Amman", dans le sud de la Syrie, a affirmé l’OSDH.

Les rebelles l’ont emporté "après 16 jours de combats", a dit cette ONG qui s’appuie sur un vaste réseau de militants et de sources médicales civiles et militaires à travers le pays. Au moins sept insurgés et huit soldats ont été tués durant l’assaut final, a ajouté l’OSDH, précisant que des "dizaines de prisonniers" détenus sur cette base avaient été libérés mais que trois étaient morts.

La Commission générale de la révolution syrienne (CGRS), un réseau de militants présents sur le terrain, a fait état de son côté de la prise d’un poste de contrôle dans le secteur de Sahm al-Golan, également dans la province de Deraa.

Une vidéo montre deux chars et plusieurs véhicules militaires pris par les rebelles. "Je jure devant Dieu, que nous allons t’avoir Bachar", clame un rebelle. L’OSDH a rapporté qu’un autre point de contrôle à l’est de Sahm al-Golan était aussi tombé aux mains des rebelles.

Toujours dans le Sud, les troupes du régime de Bachar el-Assad ont tué au moins 35 rebelles mercredi et jeudi à Qouneitra, dans la partie du Golan non occupée par Israël, et une vingtaine d’autres ont péri dans des combats dans des villages à majorité druze près de la ligne de cessez-le-feu avec Israël, selon l’OSDH.
Des balles tirées de Syrie ont par ailleurs touché samedi des véhicules militaires israéliens circulant dans la partie sud du plateau du Golan occupée par Israël, occasionnant de légers dégâts, a annoncé l’armée israélienne.

Ailleurs dans le pays, des bombardements ont eu lieu dans la province de Homs (centre), selon l’Observatoire, dont le premier bilan pour la journée de samedi fait état d’au moins 64 morts.

Par ailleurs, le Wall Street Journal rapporte samedi que la CIA a étendu son rôle en Syrie en fournissant des renseignements à certains groupes rebelles non islamistes pour les aider à combattre plus efficacement le régime de Bachar el-Assad. Citant d’actuels et anciens responsables américains sous couvert d’anonymat, le quotidien souligne que cette nouvelle aide reflète un changement d’approche de l’administration de Barack Obama par rapport à l’opposition syrienne, même si le président refuse toujours tout rôle plus poussé.

Sollicitée par l’AFP, la CIA n’a pas souhaité faire de commentaire.

En choisissant d’apporter un soutien à certains groupes rebelles, l’administration américaine cherche à endiguer la montée en puissance de groupes islamistes, comme le Front jihadiste Al-Nosra. Ce dernier est soupçonné d’affiliation avec el-Qaëda et de bénéficier de la venue de plus en plus de combattants depuis le Pakistan, rapporte le WSJ.

La CIA a par ailleurs envoyé des agents en Turquie pour aider à sélectionner les rebelles qui reçoivent des cargaisons d’armes de leurs alliés du Golfe, précise l’article. Les responsables cités par le Wall Street Journal évoquent l’inquiétude que certaines de ces armes tombent dans les mains d’islamistes.

Les chefs de l’opposition syrienne ont indiqué que la CIA travaillait également avec les services de renseignement britanniques, français et jordaniens pour entraîner les rebelles à utiliser ces armes et à déjouer les tentatives d’infiltration d’éléments pro-Assad au sein de l’opposition.

Dans le même temps, les funérailles du célèbre dignitaire religieux sunnite favorable au régime Mohammad Saïd al-Bouti et de son petits-fils, tués jeudi dans un attentat suicide qui a fait une cinquantaine de morts, ont eu lieu dans la prestigieuse mosquée des Omeyyades à Damas.

Lors des funérailles, le mufti de la République, proche du pouvoir, cheikh Ahmad Badreddine Hassoune a appelé "le monde islamique et arabe à sauver la Syrie, qui fait face à une guerre mondiale".

"Si la Syrie tombe aujourd’hui, vous allez tous suivre", a-t-il lancé dans son sermon. La cérémonie était conduite par le fils du défunt, Toufic Bouti, en présence de représentants de M. Assad, de l’Iran et du mouvement chiite libanais Hezbollah.

Enfin, les autorités syriennes ont affiché samedi leur "rejet catégorique" de la prolongation d’un an du mandat de la commission d’enquête des Nations unies sur la situation en Syrie, qu’elles ont qualifiée de "biaisée" dénonçant son "parti pris".

[Source : l’Orient-le Jour]

"Armez-nous avant qu’il ne soit trop tard"

07/03/2013

Le chef de l’Armée syrienne libre, en visite à Bruxelles, demande de l’aide.
Le chef d’état-major de l’Armée syrienne libre (ASL), le général Selim Idriss est venu pour la première fois en Europe, précisément à Bruxelles, mercredi, pour demander la livraison aux rebelles d’armes lourdes, de munitions, de missiles antichar et de missiles sol-air.

Habillé en treillis militaire, le général syrien, qui avait fait défection en juillet dernier, était reçu au Parlement européen par Guy Verhofstadt. L’ancien Premier ministre belge et son groupe des libéraux et démocrates européens (ALDE) plaident depuis des mois pour une aide militaire et humanitaire à l’opposition syrienne.

"N’attendez pas qu’il soit trop tard", a souligné le général Idriss. "Les Russes et les Iraniens soutiennent le régime. Celui-ci utilise des armes lourdes, des missiles Scud et une force aérienne très puissante."

Pour le nouveau chef de l’ASL, il n’y a pas de solution politique en Syrie, comme l’espère la communauté internationale, et seule une guerre courte, intensive, permettra de sortir le pays du cauchemar. Selon lui, l’armée de Bachar al-Assad est dominée à 90 % par des officiers alaouites, et ceux-ci ne rendront jamais les armes. Sunnite, originaire de Homs, le général Idriss a fait défection quand l’armée a voulu faire porter la responsabilité de la destruction d’un village par les "terroristes" alors que c’était elle qui l’avait détruit.

"J ’ai pris mes dispositions et je suis parti", dit-il. "Depuis le début du conflit, ma famille a déjà été déplacée quatre fois." Près de 70000 personnes ont été tuées depuis le début de la répression en 2011 et l’Onu estime désormais à plus d’un million le nombre de réfugiés syriens dans les pays voisins.

"Si nous avons les munitions nécessaires, nous sommes capables de faire tomber le régime en moins d’un mois", a-t-il promis aux députés européens.

L’ASL affirme ne pas recevoir d’armes directement de l’Ouest mais s’approvisionne sur "le marché noir intérieur" et utilise des armes saisies à l’armée nationale. Selon le général, chaque arme est enregistrée au sein de son état-major, en notant son numéro d’origine.

Interrogé sur le risque de voir ces armes tomber dans les mains des factions radicales, le général s’engage même à "les rendre" après la chute du régime. "Si vous me donnez dix fusils, nous vous rendrons dix fusils, avec les numéros identiques", a-t-il également promis.

Les Américains et les Européens refusent jusqu’ici de livrer des armes aux rebelles syriens malgré l’appui de Moscou et de Téhéran, via le Hezbollah, au régime de Damas. Le 18 février, les Européens ont admis une aide "non létale". Les Britanniques ont sauté dans la brèche en annonçant mercredi qu’ils allaient fournir des véhicules blindés aux rebelles. "Nous devons, avec le reste de l’UE, être prêts à aller plus loin, et nous ne devons exclure aucune option pour sauver des vies", a déclaré le secrétaire au Foreign Office, William Hague, aux députés britanniques.

Hier Guy Verhofstadt a appelé les Etats européens à rejoindre une coalition avec les Etats-Unis, la France et le Royaume-Uni. "Si on ne fait rien, cette guerre va continuer", a-t-il dit.

Le général Idriss, qui n’a rien d’un idéologue, a nommé deux seconds qui sont réputés proches des Frères musulmans et des salafistes. Il estime à 10 % le nombre d’islamistes radicaux se battant aux côtés de l’ASL, mais craint leur montée en puissance si les Occidentaux n’aident pas l’ASL. Interrogé sur le Front Al-Nosra, mis sur la liste noire des Etats-Unis, il insiste sur le fait que la faction islamiste, responsable de plusieurs violations des lois de la guerre, n’opère pas sous la houlette de son armée. "Nous ne sommes pas contre leur participation aux combats. Il n’y a pas de planification préalable avant les batailles. Lorsqu’il y en a une, tous ceux qui ont une arme participent au combat." Très conscient des craintes de l’Occident, après l’expérience de la Libye, le général promet que, dans une Syrie démocratique, les islamistes étrangers seront appelés à quitter le pays. "Nous ne voulons pas qu’ils influencent notre jeunesse", a-t-il dit. Selon lui, le Front Al-Nosra compte environ 5000 hommes (dont 4000 Syriens de souche) sur un total de 100000 rebelles armés.

[Source : la Libre Belgique]

Selim Idriss, déserteur l’armée syrienne à Bruxelles pour plaider sa cause

jeudi 7 mars 2013

Selim Idriss était général dans l’armée syrienne, mais il a déserté l’année dernière. Désormais, il dirige l’armée syrienne libre. Une armée de résistance, formée de déserteurs et de civils : 100 000 hommes armés et 150 000 volontaires prêts à s’engager. Mais cette armée de rebelles manque cruellement d’armes. Les Americains et les Occidentaux en général hésitent a leur en fournir, de peur que ces armes tombent entre les mains de djihadistes. Le général Idriss est de passage à Bruxelles.

Le général Idriss est un militaire, mais c’est aussi un homme. Il décrit avec émotion la détresse des millions de civils déplacés par la guerre. Mercredi, il a répondu aux questions de parlementaires européens inquiets de voir des combattants islamistes combattre aux côté de l’ASL. C’est le cas, entre autres, du front Al Nosra, classifié sur la liste des groupes terroristes par les Etats Unis.

"Le Front Al Nosra est une composante parmi d’autres", dit-il, "ils sont en première ligne sur le front. Pour nous, ils n’appartiennent pas à l’armée syrienne libre, ils se battent de leur côté et lors de chaque combat, ils le paient de leur âme, ils deviennent des martyrs. A la fin de chaque bataille, ils se retirent, le Front Al Nosra reçoit de l’aide militaire, des moyens financiers importants de l’étranger alors que du côté de l’armée syrienne libre, nous n’avons pas assez d’armes ni de munitions. Nous avons des étudiants dans nos rangs, des intellectuels, mais quand nos soldats voient que le Front Al Nosra a plus de moyens, alors ils s’enrôlent chez eux, c’est pour cela que vous devez nous aider en nous fournissant des armes. Donnez-nous des armes et des munitions pour nous défendre et je vous garantis que le régime syrien s’effondre dans le mois qui suit", a conclu le général Idriss.

[Source : RTBF]

Assad promet de «nettoyer» la Syrie

GUERRE CIVILE — Le président syrien a condamné l’attentat suicide ayant tué un célèbre dignitaire religieux sunnite favorable au régime et 49 autres personnes à Damas. Il s’engage à «nettoyer» le pays des extrémistes.

Le Conseil de sécurité des Nations unies a quant à lui condamné cet attentat .

«Je présente mes condoléances au peuple syrien pour le martyre de cheikh Mohammad Saïd al-Bouti, ce grand personnage de la Syrie et du monde islamique», a dit Bachar al-Assad dans un message diffusé dans la nuit de jeudi à vendredi.

Dans une lettre à l’ONU, le ministère syrien des Affaires étrangères, a demandé au Conseil de sécurité de «condamner ce crime terroriste et d’affirmer clairement que la communauté internationale entend lutter contre le terrorisme».

Le chef de l’opposition Ahmed Moaz al-Khatib a condamné l’attaque en disant soupçonner le régime d’être derrière l’attentat commis jeudi soir dans la mosquée al-Imane du quartier Mazraa, où cheikh Bouti donnait des cours de religion les lundi et jeudi.

Mais des manifestants anti-régime ont conspué vendredi ce dignitaire religieux. «Que ton âme soit damnée Bouti», scandaient certains à Idleb (nord) alors que d’autres dans la région de Homs promettaient un sort identique au mufti sunnite de Syrie, lui aussi proche du pouvoir, cheikh Ahmad Badreddine Hassoune, qui avait appelé à soutenir l’armée régulière.

Les funérailles de cheikh al-Bouti auront lieu samedi après la prière de midi à la mosquée des Ommeyades, l’un des lieux les plus prestigieux de Damas. Les autorités ont décrété un jour de deuil national en Syrie, selon l’agence officielle Sana.

L’attentat n’a pas été revendiqué, mais son mode opératoire, un kamikaze actionnant une ceinture d’explosifs, rappelle celui du réseau extrémiste Al-Qaïda notamment en Irak.

Cette explosion a été particulièrement meurtière: 49 morts selon le ministre de la Santé et 52 selon l’Observatoire syrien des droits de l’Homme (OSDH). Une source des services de sécurité à Damas a affirmé que cheikh al-Bouti refusait toute protection, affirmant qu’il remettait sa vie dans les mains de Dieu.

Le secrétaire général de la Ligue arabe Nabil al-Arabi, a dénoncé «l’attaque terroriste» à Damas et insisté sur «la nécessité de capturer rapidement les auteurs de ce crime haineux».

Le Conseil de sécurité des Nations unies a surmonté ses désaccords sur la Syrie vendredi pour parvenir à un rare consensus et rédiger un communiqué. «Le Conseil de sécurité condamne dans les termes les plus forts l’attaque terroriste dans une mosquée de Damas», indique le communiqué qui ne montre cependant personne du doigt.

Jusqu’à présent les 15 membres du Conseil de sécurité étaient profondément divisés sur le conflit syrien: la Russie a jusqu’ici toujours essayé de protéger son allié syrien Bachar al-Assad alors que les Etats-Unis, le Royaume-Uni et la France soutiennent l’opposition.

[Source : le Matin]

À Alep, après neuf mois de combats, la vie reprend ses droits

"Je suis rentré il y a trois semaines car il n’y a plus aucune région où l’on soit en sécurité, alors autant rester chez soi" : comme Hussein, de nombreux Alépins sont revenus, redonnant un semblant de vie à la capitale économique syrienne plongée depuis neuf mois dans la guerre.

"Avant nous cherchions des zones plus sûres, plus calmes, pour éviter à nos enfants d’entendre les bombardements mais il n’y en a plus en Syrie", affirme ce petit commerçant, père de quatre enfants, alors que résonnent des tirs au loin.

Dans sa boutique du quartier de Chaar (est), où les bombardements se sont récemment faits plus rares mais où de nombreux immeubles portent les stigmates des raids aériens, les rayonnages sont remplis.

Il vend des conserves, du riz, des fruits secs, des barres de céréales et son comptoir déborde de bonbons aux couleurs criardes.

Les prix ont flambé, reconnaît Faïm, 23 ans, un vendeur de légumes. "La tomate subventionnée par les autorités coûtait 20 livres le kilo, contre plus de 50 aujourd’hui", dit-il.

Mais la boutique est achalandée. "Alep a toujours été un centre commercial, économique et industriel, nous avons d’importantes réserves", explique Hussein. "Même si cela devait encore durer dix ans, nous ne manquerions de rien", lance-t-il confiant.

Car à Alep, la quasi-totalité des civils sont convaincus que la guerre est loin d’être finie.

Mais, assure Moustapha, un couturier de 35 ans, si "la situation des habitants d’Alep est meilleure qu’au début de la bataille (en juillet 2012) c’est surtout parce que nous nous sommes habitués à ces difficiles conditions de vie".

De fait, la plupart des échoppes des quartiers tenus par les rebelles sont ouvertes et approvisionnées depuis quelques semaines et les trottoirs sont de nouveau encombrés par les badauds.

Les rebelles, qui patrouillaient un peu partout dans la ville, sont désormais concentrés dans les zones proches du front et les armes sont moins visibles dans de nombreux quartiers.

Ce gérant d’une pâtisserie montre fièrement ses gâteaux qu’il fabrique avec des matières premières qu’il va acheter dans les quartiers tenus par le régime. Parce qu’il passe d’un côté à l’autre de la ligne de front, il préfère parler sous le couvert de l’anonymat, redoutant d’être arrêté à un barrage.

"Les quartiers tenus par l’armée sont beaucoup plus sûrs. D’abord parce qu’il ne sont pas la cible de raids aériens là-bas, mais aussi parce que dans les zones rebelles, quiconque avec une longue barbe peut en finir avec toi sans explication".

Ce n’est qu’à mots couverts qu’il évoque les groupes jihadistes. A Alep, les avis sont partagés, si ce commerçant semble leur en vouloir, Mohammed loue au contraire les combattants du Front Al-Nosra : "les zones sous leur contrôle sont sûres à 100%, celles tenues par l’Armée syrienne libre (ASL, rebelles) le sont bien moins", dit-il.

A cause de cette insécurité, certains ont attendu plus longtemps avant de sortir, craignant qu’une accalmie précaire soit rompue à tout moment.

"C’est la première fois que mes filles sortent depuis quatre ou cinq mois. La maison était devenue une prison", explique Isra, 40 ans, assise sur un banc d’un jardin public du quartier d’As-Soukkari (sud).

Elle surveille, un sourire aux lèvres, ses jumelles âgées de cinq ans qui se lancent une petite balle bleue. Sur les carrés de gazon alentour des groupes de jeunes gens, filles aux voiles colorés et garçons dans leurs habits du dimanche, discutent assis dans l’herbe.

A Alep, neuf mois après le début des combats dans cette ville cruciale, la vie reprend doucement son cours.

A quelques rues de là, quelques dizaines de manifestants défilent, réclamant la chute du régime, mais plus personne n’y prête attention.

[Source : AFP; M6]