[ [ [ Poursuite de la guerre des tranchées vers Nantes ? - Yannis Lehuédé

Pour qui n’avait pas suivi ce dossier de projet d’aéroport depuis notre dernier article, il y eut peu d’évènements "sensationnels" - médatiquement parlant - sur le terrain récemment. Quelques course-poursuites entre les policiers et les zadistes (où les derniers finirent souvent au poste), quelques échanges d’artillerie (cailloux contre grenades de désencerclement), constructions de cabanes et contrôles routiniers aux carrefours... bref, le quotidien depuis plus de 100 jours !

Depuis trois mois et une relative accalmie, la "Commission du Dialogue", chargée de faire retomber la pression militante et médiatique, a auditionné différentes parties en présence sur les modalités du projet, ne pouvant se prononcer sur le fond de "l’affaire". Son président, Claude Chéraux, a divulgué quelques pensées à la télévision avant de rendre son rapport, pour dans une petite dizaine de jours. Il a concédé que le projet - vieux de quarante ans - avait besoin d’un petit ravalement de façade. Mais pour ne pas faire sentir qu’il prenait partie pour le camp des opposants ni faire de jaloux, il a rappelé que les deux avaient exagéré leurs argumentaires. Le premier ministre et ancien maire de Nantes, son employeur est confiant. Et le Président de la République est sorti de son silence gêné pour l’appuyer en indiquant que ce projet était "indispensable" ! On n’espèrera pas plus de l’État que d’officialiser le report des travaux qui devaient initialement débuter en janvier dernier.
En réalité, le déboisement des pourtour de certaines routes a commencé discrètement. Le but de la manoeuvre n’a d’utilité que pour faire place nette avant l’arrivée des forces de l’ordre et engins de chantier sans se hasarder à nouveau dans le bocage humide... Les travaux - imminents - du barreau routiers devraient saccager la biodiversité et voir la plupart des arbres de l’Est de la ZAD arrachés.

Car avec la fin de la Commission du dialogue, plusieurs jugements d’expulsions devraient être rendus : la "Cha-teigne" sera fixée le 26 mars et la ferme de Bellevue comparaît ce mercredi 20 mars à St Nazaire à 10h, sans surprise si on se réfère aux précédents jugements. Ses occupants ont remis la ferme en activité. Pour cela, ils encourent des amendes exorbitantes de 1000€ par jour d’occupation et de 20 000€ de "dommages et intérêts" !
La broyeuse administrative entend donc prendre le relai de la force armée sur le terrain. Peu se sont émus des sommes considérables réclamées à ces huit bénévoles. Le syndicat mixte public-privé aura sans doute évité d’en demander "trop" pour ne pas tomber dans même guêpier qu’EDF au Royaume Uni (voir plus bas).

Au même moment, la Commission des pétitions du Parlement Européen doit se pencher sur les modalités écologiques de ce projet très controversé. On pourra saluer que le véritable débat démocratique - et public - se tient à Strasbourg. Grâce à la magie d’internet, il doit même être retransmis en direct !
Un militant écologiste signale pour l’occasion :
"Le simple fait que ces derniers décident par exemple de laisser ouverte la pétition signifierait que la procédure se poursuit car le soupçon de violation du droit communautaire est plus que plausible..."
Le rendez-vous est fixé à 15h (voir le lien plus bas).

Alors, devant le rouleau compresseur qui menace de se remettre en marche contre la centaine de cabanes et la forêt, les chicanes refleurissent dans la ZAD et les appels à la mobilisation sont réactivés d’urgence. Les comités de soutien se réveilleront-ils ?

Ils auront besoin de faire preuve d’inventivité car pour l’heure, les centaines de cabanes ne remplacent pas les maison de pierre détruites, et la manifestation d’ensemencement du 13 avril prochain ne rendra pas les chênes centenaires abattus...
La détermination et l’énergie des zadistes reste inébranlable après l’hiver particulièrement rigoureux qui s’achève. Magnifique !

Paris s’éveille

Dernière minute : le verdict du procès de la ferme de Bellevue sera rendu le 28 mars.

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21 écolos anglais humilient EDF qui voulait les saigner
L’entreprise française a voulu donner une bonne leçon à une poignée de militants, et à travers eux, au reste des écolos. Une stratégie « suicidaire ».

EDF s’incline face aux écolos. Après avoir réclamé près de 6 millions d’euros à des militants écologistes qui avaient campé au sommet de deux cheminées de la centrale de Nottinghamshire (propriété d’EDF), en Angleterre, la compagnie renonce, sous les huées de l’opinion publique.

Personne ou presque n’avait eu vent de l’action des 21 activistes de No dash for gas (pas de ruée vers le gaz). C’était en octobre 2012 et tous les journalistes environnement avaient les yeux rivés sur l’ouragan Sandy. La menace d’une poursuite aura suffi à redonner aux militants une place parmi les gros titres, explique une militante :

« Le jour où on a fait la manifestation, il y avait l’ouragan et beaucoup d’autres infos dans les médias. Ce à quoi on ne s’attendait pas, c’était qu’une poursuite judiciaire ferait le gros du travail pour nous. »

Graham Thompson, autre activiste de No dash for gas, approuve :

« Ils nous ont donné un espace pour faire passer notre message. »

[L’effet Streisand. En 2003, la chanteuse Barbara Streisand avait attaqué en justice un photographe : elle demandait qu’une vue aérienne de sa maison soit retirée d’un ensemble de 120 000 clichés, dont l’objet était de documenter l’érosion des côtes. Le mois suivant l’action en justice, plus de 420 000 personnes visitèrent le site du photographe.]

L’effet Streisand et la poursuite-bâillon

Mauvais calcul pour la compagnie française. L’effet Streisand – la mise en avant d’une info que l’on essayait au contraire d’étouffer– est en marche, analyse George Monbiot, journaliste environnement au Guardian. La stratégie d’EDF est un « suicide d’entreprise et de relations publiques », estime-t-il.

La requête est disproportionnée. L’opinion publique et les commentateurs l’interprètent comme une menace à la liberté d’expression et de manifestation : une poursuite-bâillon – en anglais, SLAPP (comme une gifle). George Monbiot :

« On essaye d’effrayer ceux qui auraient pu joindre la campagne. Ceux qui par la suite auraient pu s’engager dans d’autres campagnes évitent la politique par peur des conséquences. Leur absence appauvrit la démocratie. »

Car 6 millions d’euros à se partager entre 21 activistes, c’est une dette de près de 300 000 euros. « Plus que nous ne gagnerons jamais », estimait une militante.

« Ils nous ont envoyé un inventaire où l’on devait détailler nos revenus, les dépenses en gaz, électricité, emprunt immobilier, redevance télé, vêtements pour les enfants, nourriture, cantine et le montant de nos dettes.

Tout ça pour qu’ils sachent combien on gagne et qu’ils puissent décider combien ils peuvent nous prendre, chaque mois, pour le reste de notre vie. »

Pour EDF, cette somme représente 0,3% de ses bénéfices au Royaume-Uni (qui s’élèvent à près de 2 milliards d’euros).

Epinglé sur Wikipédia

La réaction de l’opinion publique ne se fait pas attendre. La pétition mise en ligne par les parents de l’une des activistes récolte plus de 64 400 signatures – dont celles de Naomi Klein et Noam Chomsky. Sur la page, les signataires expliquent ce qui les a poussés à joindre le mouvement :

« Les gens normaux ne devraient pas être intimidés par les grosses compagnies et les riches à la recherche d’un peu plus de profit. Le climat mondial est plus important que les bénéfices. »

« Si cette affaire peut aller devant la justice, qu’est-ce qui va suivre ? »

« EDF, dans ses relations avec ses clients, n’est pas seulement incompétente mais aussi agressive, grossière et menteuse. »

No dash for gas explique, sur le site EDFOff.org, comment se tourner vers d’autres fournisseurs d’énergie (ils proposent même de faire les démarches) et les futurs ex-clients font savoir leur colère.

« Par votre tentative de poursuivre ces manifestants, vous perdez à vie cinq contrats d’entreprise. »

« Merci EDF de me pousser à l’action. J’ai enfin changé de fournisseur d’énergie. Au revoir EDF. »

L’affaire No dash for gas est désormais mentionnée sur la page Wikipédia anglaise de la compagnie, signale Terence Zakka, spécialiste en communication digitale.

« Sur le long terme ce sera assez dommageable. La séquence sera difficile à effacer pour EDF. »

« Le syndrome David contre Goliath »

Ce que EDF n’avait pas prévu (ou pas compris), c’est que dans ce genre d’action, les activistes fonctionnent de pair avec le public. Les compagnies en revanche sont les « méchants » de l’histoire, explique Graham Thompson :

« Les grosses compagnies énergétiques ont mauvaise réputation : à cause de leurs tarifs, de leur manque de transparence, des affaires de piratage et de surveillance des activistes. Avec cette poursuite, ils ont prouvé qu’ils essayaient de supprimer le débat. »

Terence Zakka confirme :

« Lorsqu’une multinationale s’attaque à des activistes, et spécialement aux individus directement, c’est le syndrome David contre Goliath. Dans ce cas, la sympathie a plutôt tendance à aller vers le petit. »

« EDF a fait d’une crise un désastre »

EDF a donc abandonné sa folle requête au profit d’un compromis « juste et raisonnable » : une injonction qui interdit aux activistes de pénétrer sur les sites de EDF. Pour Kate Harrison, l’avocate qui a défendu les militants, la stratégie de EDF « a fait d’une crise un désastre ».

« Au final, tout ce qu’ils ont gagné c’est la promesse de 21 militants qu’ils ne s’approcheront pas de leurs sites. »

Pour les militants écologistes – qui devaient servir d’exemple « pour que ceux qui envisagent ce genre d’action comprennent qu’il peut y avoir des conséquences » –, c’est une victoire importante, estime Graham Thompson :

« EDF a perdu publiquement : les activistes vont s’enhardir et les grosses compagnies vont savoir qu’elles ne peuvent pas faire n’importe quoi, qu’il peut y avoir des répercussions. »

Les militants ont par ailleurs plaidé coupable à l’accusation d’intrusion sur une propriété privée et seront jugés prochainement.

Si une telle poursuite semble sévère, elle serait tout à fait possible en France. En 2009, EDF, en association avec Bouygues et Solétanche, avait poursuivi Greenpeace pour avoir occupé le chantier de la centrale nucléaire de Flamanville (Manche). Les accusant de « violation de domicile », « entrave à la liberté du travail » et « opposition à des travaux publics et d’intérêt public », ils leur réclamaient 516 000 euros de dommages et intérêts.

[Source : Rue89.com]

Les débats de la Commission des pétitions du Parlement Européen du 20 mars 2013 (deux parties) :

L’ombre des municipales plane sur Notre-Dame-des-Landes
Promoteurs et opposants au projet défendent mercredi leur position à Bruxelles.
Le contexte des municipales de 2014 risque de peser sur le calendrier.

Nouvelle zone de turbulence en vue pour le projet d’aéroport du Grand-Ouest. La commission des pétitions du Parlement européen auditionne mercredi les opposants, qui l’ont saisie en novembre, ainsi que les défenseurs de ce dossier qui vont s’employer à démontrer que la plate-forme aéroportuaire envisagée entre Nantes et Rennes respecte en tous points le droit communautaire. Après demain, les eurodéputés auront à apprécier le degré de conformité de cet aménagement avec la directive sur l’eau et la directive Natura 2000. Les deux parties qui s’opposent doivent être fixées le jour même. Soit les membres de la commission des pétitions estimeront que la France n’est pas en règle, auquel cas ils décideront d’aller plus avant pour obtenir d’elle une solution aux problèmes. Soit ils ne trouveront rien à redire et refermeront le dossier. « Si c’est le cas, le Parlement ne pourra plus exercer la même pression sur la France », redoute Sandrine Bélier, députée européenne EELV, mais satisfaite de voir que « dossier n’est plus seulement franco-français ».

Matignon plutôt zen

A l’avant-veille de ce grand oral bruxellois, Paris se veut plutôt zen. « Nous ne sommes même pas en précontentieux. Il s’agit d’une demande d’information de cette commission qui s’intéresse à tous les projets d’infrastructure », estime-t-on dans l’entourage proche de Jean-Marc Ayrault. Matignon s’en remet à la procédure initiée en novembre dernier pour calmer les esprits. La « commission du dialogue » doit rendre son rapport fin mars, début avril. « L’objectif, qui était de permettre un nouvel échange de fonds, a été vraiment atteint », juge-t-on encore à Matignon, en parlant d’une « évolution plutôt positive » du dossier. Et d’indiquer qu’« il y aura sans doute une détente dans le calendrier ».

En principe, Vinci doit donner le premier coup de pioche ce printemps. Mais le groupe va être retenu dans son élan par les interrogations que Claude Chéreau, le président de la commission du dialogue, vient d’émettre sur le projet, notamment s’agissant du seuil de saturation de Nantes-Atlantique l’actuel aéroport. « Sur ce sujet, comme sur l’exposition au bruit et l’impact économique, il faut lancer une vraie expertise indépendante », considère Ronan Dantec, sénateur EELV de Loire-Atlantique. « Cela nous entraîne forcément vers un report ».

« Outrances » écologistes

Jusqu’à quand ? Chez les écologistes, certains considèrent déjà que le gouvernement pourrait être tenté de laisser passer les municipales de mars 2014. Des comités locaux opposés au projet sont présents un peu partout en France et vont commencer à surveiller de près les prises de position des élus PS. « Ils n’ont pas envie de payer de leur personne pour défendre un projet qui ne concerne pas leur territoire », estime un élu EELV. A Matignon, également, on insiste sur la dimension locale du projet de Notre-Dame-des-Landes.

Reste qu’à Nantes, le ton est nettement moins précautionneux. « Il ne peut y avoir ni retard ni moratoire, ni, a fortiori, abandon du projet », a martelé la semaine dernière Jacques Auxiette, le président de la région des Pays-de-la-Loire, en pointant « certaines outrances et caricatures » dans le camp des écologistes.

Le projet en chiffres
1.220 hectares dont 600 mobilisés pour la plate-forme aéroportuaire.
3,8 millions de passagers prévus à l’ouverture.
Zone de chalandise : 6 millions d’habitants dans un périmètre de deux heures.
Près de 4.000 emplois directs et indirects liés au chantier.
3.250 emplois pérennes directs et 9 000 emplois indirects et induits.

[Source : Les Echos]

Dernière lettre ouverte au Président de la République :
Notre Dame des Landes le 19 mars 2013

Monsieur le Président de la République,

Depuis le 26 Août 2012, les opposants à l’aéroport de Notre Dame des Landes vous ont écrit chaque semaine une lettre argumentée. Agriculteurs, élus, citoyens, chefs d’entreprise, nous avons tenté de vous expliquer en quoi ce vieux projet, justifié par de nombreuses manipulations de chiffres et quelques mensonges était à la fois inutile, coûteux et destructeur. Nous demandions aussi, dans chaque courrier, à être enfin reçus à l’Élysée. En vain. Chaque semaine, vous nous avez fait répondre que votre emploi du temps ne vous permettait pas de nous recevoir et que notre courrier était transmis au Ministre des Transports, Monsieur Cuvillier. Lui-même doit avoir un emploi du temps semblable au vôtre puisqu’il n’a jamais daigné nous donner le moindre signe ni même nous signaler avoir reçu notre courrier.

Les 1200 élu-e-s du CéDpa, la cinquantaine d’organisations de la coordination, les 4000 adhérents de l’ACIPA, les 40 000 citoyens réunis sur les site le 17 novembre dernier, les 200 groupes de soutien dans toute la France, toutes les organisations agricoles opposées au projet ne pèsent donc rien ou presque, en tout cas moins que telle ou telle personnalité médiatique…

Nous en sommes évidemment très déçus.

Aussi cette lettre sera-t-elle la dernière. Avant d’achever cette longue correspondance qui s’apparente d’ailleurs plutôt à un monologue puisque nous n’avons eu aucune réponse de fond, nous tenons à vous faire part de notre sentiment au moment où s’achèvent les auditions de la « Commission du dialogue » mise en place par le Premier Ministre.

Bien sûr nous avions bien compris, à la lecture de sa lettre de mission (« accompagner le dialogue dans toutes les phases de réalisation du projet » (sic) !), qu’elle était mise en place pour faire retomber la tension des derniers mois 2012 et légitimer le dossier sans le remettre en cause. De ce fait, certains groupes de notre coordination ont naturellement refusé de rencontrer cette commission quand, dans le même temps, les forces de l’ordre étaient toujours en nombre à Notre-Dame-des-Landes et que des destructions de maisons se poursuivaient. Cependant, les élu-e-s du CéDpa, conscients des responsabilités dictées par leurs mandats, n’ont pas voulu pratiquer la politique de la chaise vide et ont accepté de la rencontrer. Vous trouverez ci-après leurs analyses :

« Nous avons été reçus quatre fois longuement. Nous reconnaissons volontiers la qualité de l’écoute de ses trois membres. C’est d’ailleurs la première fois que nous avons pu développer dans le détail nos arguments et présenter nos alternatives. Nous avons fourni de nombreux documents, des chiffres, des cartes, et avons demandé que tout ce travail soit annexé au rapport final et rendu public. Nous avons aussi demandé à la commission de relayer auprès de la DGAC les très nombreuses questions sur les fondements de la Déclaration d’Utilité Publique, auxquelles elle a jusqu’ici refusé de répondre clairement. Le Président Claude Chéreau nous a aussi confirmé avoir demandé une étude rapide sur ce que pourrait être un Plan d’Exposition au Bruit révisé sur Nantes. Demande qui était la nôtre depuis plusieurs années, toujours refusée au motif « qu’on allait partir à Notre Dame des Landes ».

Malgré cette réelle qualité d’écoute et la volonté exprimée par les membres de la commission d’ « objectiver certains points », nous sommes sans illusion comme nous l’étions au démarrage pour les raisons évoquées plus haut. Notre dernière audition, mercredi 13 mars, a confirmé nos craintes. Même si le Président Chéreau a affirmé qu’à ce jour il ne savait pas encore quelles recommandations seraient faites par sa commission, la discussion qui a suivi nous a donné un certain nombre d’indications.

La commission reconnaîtra vraisemblablement que nombre d’arguments des porteurs de projet ne sont pas valides, par exemple la saturation de la piste (ce que le débat public de 2003 avait déjà tranché). Elle reconnaîtra aussi sans doute que l’extension dans le temps des procédures (débat en 2003, DUP en 2008, enquête loi sur l’eau en 2012) n’a pas contribué à la clarté du débat et explique en partie la situation de blocage actuelle. Cependant, si l’on en juge par les propos tenus, l’argument du pari sur l’avenir surtout en période de crise et la nécessité de proposer un aéroport aux hommes d’affaires afin de relier toutes les capitales européennes dans la journée seront à nouveau utilisés. Lorsque nous avons demandé en quoi Nantes-Atlantique ne pouvait être cet aéroport, on nous a opposé la question du bruit et du risque … Ne vous méprenez pas, nous ne sous-estimons pas ces questions mais nous demandons qu’elles soient elles aussi objectivées. En effet, il nous semble que si ces critères étaient retenus, alors il faudrait que l’État se prépare à financer le déménagement de nombreux aéroports français (Nice, Toulouse, Clermont-Ferrand, Orly, Roissy, ...) dans une période de restriction budgétaire jamais vue. Le seront-elles vraiment ? Nous en doutons.

Enfin, nous avons été étonnés que le Président Chéreau semble faire une comparaison de qualité environnementale entre le Lac de Grandlieu survolé sans dommage depuis des décennies, et la zone de Notre Dame des Landes. Evidemment, le lac est un site exceptionnel mais les ornithologues le savent et l’ont dit – apparemment sans être crus ? - le survol n’est pas un danger pour les oiseaux qui sont beaucoup plus menacés par la dégradation de la qualité de l’eau (assainissement et pratiques agricoles) et qui risque de l’être demain en cas d’ouverture à une urbanisation plus forte du secteur. Même si le site de Notre Dame des Landes est différent de la Brière, ou du Lac de Grandlieu, il n’empêche que la destruction de son bocage et de son système hydraulique, en tête de deux bassins versants, serait une véritable atteinte à la qualité de l’eau et à la biodiversité.

Nous ne pouvons ni ne voulons préjuger des recommandations qui seront faites au gouvernement par la commission : peut-être suggérera-t-elle de moins consommer d’espace à Notre Dame des Landes (moins de parkings ? une seule piste ??). Peut-être ira-t-elle jusqu’à dire qu’il n’y a pas réelle urgence et que des études complémentaires seraient nécessaires ? Cependant le Président nous a clairement dit « qu’il n’avait pas de doute sur la pertinence d’un nouvel outil », ce qui nous conforte dans notre méfiance du début. Le Premier Ministre pourrait ainsi afficher sa satisfaction puisqu’il aura donné une image d’écoute et de dialogue mais cela ne le fera pas bouger sur le fond. Voyez-vous, Monsieur le Président, nous connaissons bien ici « la démocratie à la nantaise »… D’ailleurs, pendant le « dialogue », la destruction d’une nouvelle maison est intervenue, AGO déclare qu’il veut détruire au plus vite la Ferme de Bellevue, les fouilles archéologiques ont continué et le début des travaux routiers est annoncé, le tout sous protection militaire, sans doute fort coûteuse… »

Nous, Coordination des opposants au projet d’aéroport à Notre-Dame-des-Landes, continuerons donc à mener notre combat devant l’Europe et la Justice pour que soit stoppé ce projet inutile, dépassé et fort coûteux, et aussi sur le terrain, avec tous les habitants de la zone déterminés à gagner cette lutte.

Nous vous prions d’agréer, Monsieur le Président, nos salutations certes respectueuses mais aussi très amères.

La coordination des opposants
[Source ACIPA]

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