[ [ [ Quand ceux qui croient encore au père Noël croisent le père Fouettard - Yannis Lehuédé

Grenoble. Son maire mégalo Michel Destot, qui poursuit le rêve de transformer sa ville en une technopole pour cadres et ingénieurs à haut revenus. Récemment vexé par les déclarations d’Estrosi (maire de Nice et champion national de la vidéosurveillance) sur la responsabilité des maires en matière de sécurité, il veut prouver à tout prix qu’il peut être plus sécuritaire que ce dernier.
Grenoble. Son adjoint à la sécurité, Jérôme Safar en mal de reconnaissance, qui pense avoir trouvé dans la vidéosurveillance le moyen de se faire un nom, et de réussir sa vie. Après avoir implanté en douce des caméras intelligentes dans nos rues, après avoir lancé des projets de vidéosurveillance à la Capuche, au Village Olympique, et au Jardin de Ville, il a présenté lors du dernier conseil municipal son nouveau programme de sécurité urbaine : plus de flics, (extension des horaires, création d’une brigade canine) et implantation de caméras sur tous les bâtiments municipaux : écoles, bibliothèques, conservatoire, MJC…

Grenoble. Ses habitants, enfin, qui tous les jours font les frais des lubies sécuritaire, de l’orgueil et de la vanité de leurs dirigeants locaux. Dernier exemple en date : mercredi 1er décembre.

Il est 17 heures lorsque place Félix Poulat, une bataille de boule de neige éclate. Rapidement, la bataille fait boule de neige (!) et ce sont quelques dizaines de personnes qui commencent à s’affronter dans une ambiance très bon enfant. La bataille se déplace vers la place Victor Hugo, où se tient le marché de Noël et continue de plus belle. Quelques passants rejoignent la bataille en cours de route, et le centre de la place devient le lieu d’un joyeux affrontement, rompant avec la monotonie d’un marché où la magie de Noël a depuis longtemps laissé place à la seule magie du fric.

Les vigiles du marché, n’appréciant pas que nos joyeux lurons aient fait de cet espace marchand leur terrain de jeu, interviennent rapidement pour les en déloger. Quelques boules de neige partent dans leur direction. La bataille se poursuit quelques minutes, puis les vigiles devenant violents, les participants à la bataille préfèrent se retirer, et continuer la bataille plus loin.

Cinq minutes plus tard, la bataille reprend tranquillement place Félix Poulat. C’est à ce moment-là que plus d’une dizaine de policiers municipaux arrivent en courant. Ils tentent d’interpeller tous les groupes qui se trouvent sur la place. De nombreuses personnes s’esquivent. D’autres ont moins de chance et se retrouvent plaquées contre un mur, menacées par des gazeuses. Quatre personnes arrêtées dans une rue voisines sont menottées entre elles et amenées sur la place Félix Poulat. La police nationale arrive aussi. Au moins trois véhicules qui arrivent à fond, ce qui porte le nombre de policiers à plus d’une vingtaine. Au moins deux autres personnes sont arrêtées.

Les passants sont scandalisés. «Pour une simple bataille de boules de neige ? Eh ben… On dit de Marseille, mais Grenoble c’est bien pire !» «Si on peut plus jeter des boules de neige, mais où on va ? Ça devient grave.»

La police fait venir les vigiles du marché de Noël afin qu’ils identifient les personnes arrêtées, et un des vigiles affirme qu’elles ont toutes participé à la bataille. Les personnes arrêtées subissent un contrôle d’identité. Elles sont visiblement accusées d’avoir arraché une guirlande électrique sur un arbre au cours de la bataille. Après avoir été menottées pendant une heure sous la neige, les personnes sont relâchées. Il semblerait que les policiers aient fortement incité les responsables du marché à porter plainte contre ces personnes.

25 flics et 6 interpellations pour une bataille de boules de neige ! Destot et Safar sont en train de faire de Grenoble une ville invivable. Si nous ne faisons rien pour mettre fin à la politique liberticide de nos technarques locaux, il est probable que la prochaine bataille de boules de neige se passera sous l’œil des multiples caméras intelligentes qui auront recouvert la ville. Le témoignage des vigiles deviendra inutile, puisque les caméras auront reconnu le visage des participants. Les trublions une fois reconnus automatiquement seront interpellés par les brigades canines, ou par des policiers municipaux équipés de Tazer et de Flash Ball. (Ces fameuses armes non létales qui ont encore fait un mort cette semaine.)

Il est d’ailleurs plus probable que dans ces conditions, il n’y ait plus jamais de bataille de boules de neige. Et que jamais plus rien ne vienne troubler la morosité d’un centre-ville, transformé en galerie marchande, où les passants n’auront qu’à consommer et circuler, sans s’adresser la parole, sans sortir des rôles qui leur auront été assignés, et en interdisant à leurs enfants de jouer avec la neige.

Des boules de neige, pas des Flash Ball !

Un bonhomme de neige - Indymedia Grenoble, 2 décembre 2010.

[Source : Le Jura Libertaire]

En la misma sección