Arusha a contacté le Quotidien des Sans-Papiers pour partager une chanson, Méditerranée, née d’une collaboration entre la France et le Kenya [1].
Un hommage à ces milliers de "noyades anonymes" et un rappel qu’elles sont les conséquences des politiques européennes de répression de l’immigration.
Méditerranée
Paroles & musique: Arusha;
Guitare: Isaac Mugunda; guitare enregistrée par Elchie@RootsCampKenya;
Chant: Arusha;
Flute: Serena;
Percussions: Simon Maranga Nyarieko (YUNASI)
Produit par Vayn
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Parce que j’étais en colère et révoltée... Le droit de se déplacer en toute liberté me paraît un droit fondamental de tout citoyen sur cette planète...
Je ne supporte pas cette hypocrisie qui dicte que si on a un certain passeport on a le droit de voyager en paix, de s’ouvrir l’esprit, d’aller a la rencontre d’opportunités...
Mais avec le mauvais passeport, on a même pas le droit de rêver, et si on doit voyager, c’est seulement dans les pires conditions possibles et ce parce qu’on souhaite offrir un petit avenir a sa famille... Je ne supporte pas la façon dont le mot "immigre" est utilisé par les politiques pour galvaniser la peur et le ressentiment de leurs électeurs....
Et l’hypocrisie qui dicte que si un Français part travailler au Kenya pour une ONG, c’est respectable, mais si un Malien vient en France chercher du travail, c’est suspect et criminel...
Ce sont ces sentiments qui ont inspiré cette chanson... Je voudrais voir les politiques de l’Union Européenne reconnaître les dégâts criminels provoqués par leurs lois, je voudrais que les centaines de gens noyés dans la Méditerranée se voient offert l’hommage qu’ils méritent...
Et que les véritables raisons qui poussent les gens a s’expatrier dans ces conditions les plus effroyables soient réellement évoquées...
Et que le luxe du voyage, de la recherche d’opportunités, ne soient pas l’apanage exclusif des pays riches et des élites des pays les plus pauvres...
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Les paroles
mer méditérranée, oh ma mère méditérannée, oui ma mort méditérrannée, oh cette mort méditérrannée…
• mer méditérrannée, toi si belle, toi si calme,
au bleu azur, azur et jade;
caveau liquide, tombe outre-mer et cobalt
témoin d’autant de noyades
anonymes!
tant de cris étouffés dans tes vagues, de bateaux engouffrés dans tes naufrages…
ces centaines d’âmes perdues oubliées parmi tes mirages…
mer méditérranée, oh ma mère méditérannée, oui ma mort méditérrannée, oh cette mort méditérrannée…
• de Lampedusa à Gibraltar, les corps que tu régurgites au bord des plages,
viennent troubler le soleil doré des vacanciers,
viennent hanter le rêve des passants, le sommeil tremblotant des écoliers,
cette longue souffrance, le soleil voile, noyé des sans-papiers…
anonymes!
• ni d’ici ni d’là-bas, sans papiers tu n’es pas, sans papiers c’est sans droit sans toit,
alors que toi et moi traversons les oceans, sans papiers
moi et toi nous y mourrons dedans…
anonymes!
ni d’ici ni d’là-bas, victimes noyées des lois, légiférées dans les riches couloirs politiques…
victimes des manipulations médiatiques, des crédulités, des peurs publiques,
• oh mer méditérrannée…
oh ma mère, laissée à attendre, rêver, espérer…
un petit retour, une petite parcelle de moi, de ma mort méditérrannée…
anonyme!
• déjà mon coeur me brule, mes paupières se ferment, je ne vois que le bleu autour…
les derniers larmes des voyageurs, les derniers cris, les derniers pleurs…oh ma mère
un silence azur, une infinie douleur de cette mort, cette mort méditérrannée…
mer méditérranée, oh ma mère méditérannée, oui ma mort méditérrannée, oh cette mort méditérrannée…