[ [ [ Faut-il psychiatriser l’Élysée ? - Yannis Lehuédé

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Alors que la contestation de la LOPPSI 2 ne cesse de croître à mesure que l’on découvre toutes les bassesses contenues dans les 48 articles qui la composent, le gouvernent a sous le coude un autre projet de loi liberticide qui devrait être présentée à l’Assemblée Nationale au printemps.

Le projet de loi sur la psychiatrie à provoqué un tollé immédiat dans tout le secteur psychiatrique ; usagers, personnels soignants, psychiatres, associations, syndicats professionnels et défenseurs des Droits Humains sont atterrés par la refonte envisagée :

"Ce projet de loi est un leurre démagogique à l’égard des familles, des voisins, de l’ordre public. Voté, il aurait des conséquences lourdes pour les libertés individuelles, les droits collectifs et le soin psychique. Nous demandons instamment aux parlementaires de repousser un tel projet. Nous invitons professionnels, élus, usagers, citoyens à débattre partout et à faire valoir l’alternative esquissée ici pour répondre à la situation." Peut-on lire sur le site du collectif Mais c’est un homme !

Ainsi nommé en référence à Primo Levi et son "Si c’est un homme", le collectif réunit les associations, syndicats et partis politiques qui participent à l’Appel contre les soins sécuritaires lancé le 15 septembre 2010. Pourtant personne n’en a entendu parlé. Pas très sexy la psychiatrie.

Lors de cette conférence de presse, seul un quotidien de gauche avait dépêché un journaliste, et il n’avait pas l’air de croire ce qui lui était expliqué. Il faut dire à sa décharge que la version officielle met en avant la sécurité et l’efficacité (pour changer) et que comme il le précisait lui-même : "les familles des usagers semblent heureuses qu’on leur propose enfin une solution". Ce sympathique trentenaire, qui débarque d’une autre planète n’a aucune raison d’en douter car il n’a pas entendu parler de la loi de programmation militaire ni de la refonte du code du travail, du traité de Lisbonne, des RASED, du CPE, d’hadopi, du RSA entre autres inélégances anxiogènes. Et il n’a donc pas l’impression qu’on utilise ces familles comme prétexte pour passer des textes qui empestent le totalitarisme sans rien régler des difficultés rencontrés par les citoyens usagers de la santé mentale, ni de leurs entourages.

Force est de constater que depuis 1990, année du dernier toilettage, le législateur n’a pas eu le temps de mettre ce sujet à l’ordre du jour, et que le système psychiatrique français continue de faire de nombreuses victimes. Les associations d’usagers et les divers expériences encourageantes se retrouvent sans subventions. Les hospitalisations sous contrainte qui devraient être exceptionnelles sont devenues la règle ; et avec ce nouveau texte, il se pourrait que l’on soit enfermé chez soi et médicalisé de force. Pour que ça n’ait pas que la couleur de Kafka, on prévoit une garde à vue psychiatrique de 72h sans avocat mais avec camisole chimique, sur simple décision du préfet, qui comme chacun sait, est particulièrement compétent en matière psychiatrique puisque c’est le chef de la police !

Personnellement, j’émets l’hypothèse suivante : l’élection de Sarkozy a causé une bouffé délirante contagieuse chez les soldats de l’économie décomplexée et les lobbyistes qui s’habillent chez Démocratie & République, qui l’ont refilé aux journalistes au diner du Siècle et ainsi de suite ; et c’est l’effet papillon qui à provoqué la crise économique. Donc il faut un vaccin !

Plus sérieusement, le soin psychique est un sujet incontournable, la politique de l’autruche et le maquillage sécuritaire aggrave la situation. Le nombre d’internements sous contrainte explose en même temps que celui des garde à vues ; le stress et l’alcool font des ravages au travail, à l’école et à la maison. La consommation de médicaments et de psychotropes est vertigineuse. La souffrance psychologique est partout, de la bourse aux Restos Du Coeur. Il y a même une journée européenne de la dépression ! C’est bien de santé publique qu’il s’agit.

C’est sûrement pour ça que la presse à également boudé le débat public qui se tenait le 9 novembre 2010 dans le 2ème arrondissement de Paris, pour lequel elle avait reçu une invitation. Il y avait là des élu(e)s, c’était bien décoré, ça aurait pu être très joli avec des journalistes partout, y’avait la place, c’était important, mais non, ils étaient ailleurs.

Ceci dit, il faut reconnaître que depuis que le gouvernement légifère sur fait-divers, les journalistes sont débordés. Et pas très attentifs à la cohérence législative de ce gouvernement qu’il est difficile de distinguer de ce que la France à fait de pire en la matière. Pauvres journalistes ! Pas vraiment sexy non plus l’ignoble hypocrisie règlementaire. Celle qui oblige la police à harceler les pauvres, les différents, les récalcitrants et à remplir les prisons. Celle qui pénalise les drogues et invente les mafia. Celle qui coupe les financements sociaux pour raisons d’austérité et subventionne des gâchis inconséquents pour l’apparat. Celle qui légalise les paradis fiscaux. Celle qui cache les preuves de corruption sous le secret d’état. Celle qui rend la justice détestable et la paix sociale impossible. Celle qui nous divise.

PS : Ces interventions ont été filmées presque par hasard. elles constituent sans doute une bonne synthèse sur ce projet de loi.

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