Le Mrap porte plainte devant la Cour de justice de la République – tribunal des ministres en exercice –, contre le ministre de l’Intérieur, Manuel Valls, pour ses propos hallucinants sur les Roms qui n’auraient pas "vocation" à "s’intégrer" dans le pays qu’il gouverne. C’est ce que suggère aussi le député communiste Jean-Claude Lefort (voir ci-dessous), réclamant de plus la démission du ministre sans délai, puisqu’il s’est effectivement rendu responsable d’infractions susceptibles d’être condamnées (et ce devant cette cour spéciale – si celle-ci n’avait pas la mauvaise habitude refuser d’instruire quand ça lui chante, ainsi que le Mrap a pu le vérifier en voyant de semblables plaintes contre deux prédécesseurs de Valls, Guéant et Hortefeux, sèchement rejetées).
On connaissait Jean-Claude Lefort pour avoir été le seul député à s’engager clairement dans la recherche de la vérité sur l’action de la France au Rwanda et ses responsabilités dans le génocide des Tutsi de 1994.
S’il était minuit dans le siècle, autrement dit aux heures les plus sombres, c’est le même homme qu’on voit se dresser aujourd’hui pour demander la démission du ministre de l’intérieur responsable non seulement d’avoir prononcé des propos racistes incriminables, comme le dénonce Lefort, mais bien pire encore de constituer un quasi consensus, à forces de sondages à la une des journaux qui lui accordent jusqu’à 80% ou plus d’adhésion dans la population.
Ainsi, jamais la France n’aura été aussi bas depuis 1940. Le consensus pétainiste reconstitué, Gobineau institué de fait comme penseur fondamental. Et c’est bien, du Rwanda aux Roms, le même sujet qui pointe l’oreille : au delà de l’Etat raciste, dans son sillage, le peuple le plus salement raciste, salement parce qu’habillé en col blanc et armé de toutes les ficelles de subtiles rhétoriques assassines.
On sous-estime la capacité de manipulation de cet Etat. Mille ans de monarchie suivis de deux siècles de république, avec plus d’un siècle d’éducation universelle, le tout héritant des leçons de l’empire romain intensément révisées, auront permis de développer la science du pouvoir la plus retorse. Aujourd’hui, quelques sondages (éventuellement manipulés) suffiraient presque à asseoir le coup d’état du petit Mussolini d’Evry. Ils auront en tout cas installé l’image du nouveau pétainisme – un pays où les défenseurs des libertés se retrouvent bien seuls, comme titre cet après-midi Le Monde.
Contre cette horrible gale, Jean-Claude Lefort appelle à résister, et appeler avec lui à la nécessaire démission de Valls – pour refonder une république antiraciste, la seule que l’on puisse désirer, la seule où l’on peut vouloir vivre.
Paris s’éveille
PS A noter que tous les liens vers la pétition demandant la démission du ministre néo-fasciste sont actuellement inactifs… A en croire google seuls un blog de mediapart, le site de l’UJFP, celui de la Feuille de chou et celui de la LDH-Toulon répercutent cette pétition supposée être en ligne dont l’hébergeur affiche une erreur 503, "service unavailable"… Faut-il croire que la police est bien faite ?
Valls démission ! La Tribune de Jean-Claude Lefort contre les propos innacceptables de Valls
4 octobre 2013
Désormais Manuel Valls doit démissionner !
Tribune et pétition de Jean-Claude Lefort contre les propos innacceptables de Manuel Valls.
Je dois reprendre aujourd’hui la plume car les bornes de l’indécence sont largement atteintes.
A la suite du Conseil des ministres de mercredi, le bruit avait fuité selon lequel Manuel Valls aurait fait amende honorable devant le Conseil et qu’il avait admis avoir commis une « maladresse » en déclarant que « les Roms ont vocation à rester ou repartir » dans leur pays d’origine. Une heure après, on apprenait par son « entourage » que le ministre maintenait ses propos et n’avait jamais admis avoir commis pareille « maladresse ».
De toute façon, ce n’est pas une maladresse qu’il a commise. Il a proféré des propos racistes. Et les propos racistes ne sont pas des « maladresses » car il n’y a pas de racisme " maladroit ". Et ses propos constituent un délit puni par la loi sur la presse de 1881, article 24 deuxième alinéa.
Cette loi est précise et s’applique pleinement en la circonstance.
Lisez vous-même :
« Ceux qui, par l’un des moyens énoncés à l’article 23, auront provoqué à la discrimination, à la haine ou à la violence à l’égard d’une personne ou d’un groupe de personnes à raison de leur origine ou de leur appartenance ou de leur non-appartenance à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée, seront punis d’un an d’emprisonnement et de 45 000 euros d’amende ou de l’une de ces deux peines seulement. »
Manuel Valls a bien provoqué à la discrimination raciale en parlant des Roms. Aucun doute. Des poursuites judiciaires sont recevables.
Un ministre de la République ne peut distiller ou pratiquer le racisme sous quelque forme que ce soit. Il ne peut pas rester en fonction. Il doit démissionner ou être démissionné. La balle est dans les mains du Président de la république.
C’est quand même terrible que Manuel Valls ne comprenne pas, ou ne veuille pas comprendre, que des hommes et des femmes puissent fuir leurs pays d’origine du fait des discriminations qu’ils subissent. Ses parents l’ont fait qui fuyaient le régime franquiste en Espagne.
Albert Einstein, le Juif, s’est réfugié aux Etats-Unis du fait de l’antisémitisme absolu des nazis en Allemagne. Combien de Polonais Juifs l’ont également fait. Dans les Brigades internationales il y avait un bataillon juif. Des Juifs qui avaient fui leurs pays à cause de rafles, des mortels pogroms et de persécutions horribles dont ils étaient l’objet.
Varsovie, te souviens-tu Manuel ?
De toute évidence, « le ventre est encore fécond d’où sorti la bête immonde ».
On ne peut laisser passer. « No pasaran ! »
Jean-Claude Lefort
Député honoraire, Fils de Manouche
Manuel, tu avais "vocation" à retourner en Espagne en 1982
Manuel, tu as déclaré hier soir sur BFM TV, que la situation était très différente pour toi, relativement à celle des Roms, car ta famille espagnole était venue en France pour fuir le franquisme.
Tu as été naturalisé Français en 1982. Franco est mort en 1975. Sept ans avant ta naturalisation. Quand tu es devenu Français il n’y avait donc plus de dictature en Espagne. Tu avais donc «vocation», selon tes mots, à retourner dans ton pays de naissance, en Espagne. Tu ne l’as pas fait et je comprends parfaitement de même que je comprends totalement ton souhait de devenir Français. Cela sans l’ombre d’un doute.
Tu avais «vocation» à retourner à Barcelone, en Espagne où tu es né, pour reprendre tes propos qui concernaient uniquement les Roms. Celui qui t’écrit, en ce moment, est un Français d’origine manouche par son père. Mon père, manouche et Français, est allé en 1936 en Espagne pour combattre le franquisme les armes à la main dans les Brigades internationales. Pour la liberté de ton pays de naissance et donc celle de ta famille. Il en est mort, Manuel. Des suites des blessures infligées par les franquistes sur le front de Jarama, en 1937. Je ne te demande aucun remerciement ni certainement pas la moindre compassion. Je la récuse par avance. Je suis honoré en vérité qu’il ait fait ce choix quand bien même il a privé ma famille de sa présence alors que je n’avais que 9 ans et ma sœur 18.
La guerre mondiale est venue. Et les camps nazis se sont aussi ouverts aux Tziganes. Tu le sais. Mais un nombre énorme de Manouches, de Gitans et d’Espagnols se sont engagés dans la résistance sur le sol français. Ton père aurait pu en être. Il en avait l’âge puisque il est né en 1923. Georges Séguy et d’autres sont entrés en résistance à 16 ans. Je ne lui reproche aucunement de ne pas l’avoir fait, bien évidemment. Mais je te demande le respect absolu pour celles et ceux qui se sont engagés dans la résistance contre le franquisme, puis ensuite contre le nazisme et le fascisme. Contre ceux qui avaient fait Guernica. Et pourtant, à te suivre, ils avaient «vocation» à retourner ou à rester dans leurs pays d’origine, ces «Etrangers et nos frères pourtant»...
Manuel, «on» a accueilli la Roumanie et la Bulgarie dans l’Union européenne alors que ces pays ne respectaient pas, et ne respectent toujours pas, un des fondamentaux pour devenir ou être membre de l’Union européenne : le respect des minorités nationales. Sensible à cette question pour des raisons évidentes, je m’en étais fortement inquiété à l’époque. En tant que député je suis allé à Bruxelles auprès de la Commission pour prouver et dire que ces pays ne respectaient pas cette clause fondamentale. On m’a souri au nez, figure-toi.
Et aujourd’hui dans ces pays la situation des Roms s’est encore aggravée. Pas améliorée, je dis bien: aggravée. Et ils ont «vocation» à rester dans leurs pays ou à y revenir? C’est donc, pour toi, une espèce humaine particulière qui pourrait, elle, supporter les brimades, les discriminations et les humiliations de toutes sortes? Ces pays d’origine ne sont pas des dictatures? C’est certain. Mais ce ne sont pas des démocraties pleines et entières pour autant.
Alors toi l’espagnol devenu Français, tu ne comprends pas? Fuir son pays, tu ne comprends pas? Toi, tu ne comprends pas que personne n’a «vocation» à rester ou revenir dans son pays? Sauf si tu es adepte de conceptions très spéciales, à savoir que ce qui vaudrait pour un Roumain ne vaudrait pas pour un Espagnol. Tu sais pourtant que le mot «race» va disparaître de nos lois. A juste titre car il n’y a pas de races, juste une espèce humaine. Et les Roms en sont.
La fermeté doit s’exercer là où se trouvent les responsabilités. Pas sur de pauvres individus qui n’en peuvent plus. Savoir accueillir et savoir faire respecter nos lois ne sont pas deux concepts antagoniques. Mais quand on est de gauche on n’a pas la
matraque en guise de cœur.
C’est un Français d’origine manouche qui t’écrit et qui écrit au Français de fraîche date que tu es. C’est un fils de «brigadiste» qui se rappelle à toi. Souviens-t-en : « Celui qui n’a pas de mémoire n’a pas d’avenir. »
Pour l’heure Manuel, j’ai la nausée. Tes propos me font gerber, même pire. Nos pères auraient donc fait tout ça pour rien ou pour « ça » ?
Ils sont morts pour la France, Manuel. Pour que vive la France. Inclus « ces étrangers et nos frères pourtant ».
Jean-Claude Lefort
Député honoraire, Fils de Manouche
[Jean-Claude Lefort aura été entendu au moins par le Mrap :]
Le MRAP dépose plainte contre Manuel Valls
Le Conseil National du MRAP a décidé à l’unanimité le dépôt d’une
plainte devant la Cour de Justice de la République à l’encontre de
Manuel Valls, Ministre de l’Intérieur, pour provocation à la violence,
la haine et la discrimination raciste.
En effet, les propos tenus sur France Inter par Manuel Valls le 24
septembre 2013 selon lesquels les Roms sont des « populations qui ont
des modes de vie extrêmement différents des nôtres et qui sont
évidemment en confrontation » ou encore « les Roms ont vocation à
revenir en Roumanie ou en Bulgarie » ou enfin, « j’aide les Français
contre ces populations, ces populations contre les français » sont des
allégations méprisantes, injurieuses à l’égard des Roms, qui incitent à
la discrimination, à la violence et à la haine.
A l’instar de Brice Hortefeux et de Claude Guéant, Manuel Valls inscrit
dans la continuité une politique de bouc-émissaire.
Le MRAP par cette action en justice reste fidèle à ses valeurs et ses
engagements historiques.
Le MRAP sera représenté par Maître Pierre Mairat, Avocat.
Paris, le 10 octobre 2013.