[ [ [ Répression des semeurs ! - Yannis Lehuédé

Au lendemain du weekend Sème Ta Zad, la journée de lundi a connu des "affrontements" près de Notre Dame des Landes. Ils ont pour cause l’abandon des forces de police des carrefours stratégiques de la ZAD, puis leur reprise musclée lundi par la préfecture. Malgré la présence de nombreux journalistes - alertés par un soutien parisien - l’équipe médicale des zadistes dénombre dans un communiqué reproduit plus bas de nouveau tirs de flashball et utilisation de grenades assourdissantes, lacrymogènes... dans le plus grand irrespect des règlementations qui encadrent l’utilisation de ces armes de guerre (voir aussi la vidéo amateur plus bas). Comme toujours, des personnes ont été interpellées pour servir d’exemple, notamment de la ferme de Bellevue. Qu’importe, le clivage entre opposants "radicaux" et "historiques" est à nouveau mis en avant.

Mais on pourra se demander pour quelles raisons les forces de l’ordre ont opéré ce repli stratégique des carrefours qu’ils occupaient depuis près de 150 jours, pressant tous les riverains de contrôles routiers, fouilles, intimidations et brimades incessantes...
Après la petite victoire des opposants avec les doutes émis par les commissions qui se sont penchées sur ce dossier d’aéroport, le gouvernement a sans doute mal digéré l’affront des "anticapitalistes" qui ont eu l’audace d’organiser l’évènement politique de ce weekend : remettre en culture les terres libérées de la zone, tout naturellement !

Car, depuis la condamnation de l’association Kokopelli (200 000 euros d’amende) en juillet dernier, faire circuler des graines et des semences ancestrales est controversé et durement réprimé. Parallèlement, malgré le pseudo moratoire sur les cultures OGM, les géants de l’agro-alimentaire imposent leurs règles marchandes dans l’opacité totale (voir le récit de l’action contre Monsanto dans l’Aude, plus bas).
Les USA ont même discrètement légiféré pour permettre à cette entreprise de se passer de toute homologation et d’être à l’abri d’éventuelles décisions judiciaires.

Relancer les "affrontements" à Notre Dame des Landes aura sans-doute été un prétexte pour éviter ce sujet - parmi tant d’autres - qui n’avait pas échappé au mouvement de résistance suivi en France et ailleurs.

La contestation au brevetage du vivant par les multinationales (protégées par les États occidentaux) ne devrait que s’amplifier.
On redécouvre les bienfaits de certaines plantes comme le chanvre, écologiquement et économiquement. Un actionnaire de Total comparait cette dernière en 2011 à un "véritable cochon vert" pour sa grande capacité de fixation du CO2 (cinq fois supérieure à une forêt tropicale, pour une superficie de culture équivalente) ainsi que pour la fabrication de papier sans déforestation. Les propriétés médicinales de nombreuses plantes comme celle-là sont également connues depuis l’antiquité.

Ainsi, des militants sont décidés à lancer l’opération "Sème Ta Graine" pour envahir le pays de cultures sauvages, redonner vigueur à la biodiversité et briser le tabou qui entoure cette question... ZAD partout !

Paris s’éveille

Communiqué de l’équipe médic 15.04.2013
Dans la presse vous entendrez beaucoup parler des trois gendarmes blessés mais, peu des personnes subissant les violences physiques et psychologiques de cette opération militaire.

En tant qu’équipe medic on voulait transmettre ce que l’on a vu aujourd’hui. Alors qu’hier on célébrait la libération du carrefour de la Saulce deux jours plus tôt par un pique-nique festif sans autres blessures que des coups de soleil, ce matin les gendarmes sont revenus en nombre reprendre le carrefour, réinstaurer leur occupation militaire. Dans ce cadre là, on a vu de nombreux tirs tendus de flashball et grenades assourdissantes a courte distance, qui ont infligé de nombreuses blessures dont certaines pris en charge par l’équipe medic :

  • impacts par flashball :

— oedèmes et hématomes :
— - trois personnes dans les jambes
— - une personne dans le bras
— - une personne dans les épaules
— - trois personnes dans le thorax
— - une personne dans le dos
— un impact dans la tête entrainant une plaie ouverte du crâne nécessitant cinq points de suture
— un impact dans le visage provocant un arrachement important de l’arcade et un enfoncement des sinus accompagné par une hémorragie importante nécessitant une prise en charge par les pompiers

  • impacts par des grenades assourdissantes :

— plaies, brulures et corps étrangers faits par les éclats de grenade :
— - trois personnes dans les jambes
— - une personne dans une fesse

  • blaste :
    — multiples personnes choquées (désorientations, acouphènes)
    — une personne plus gravement atteinte malgré la présence d’une palette la protégeant des impacts des éclats
  • des nombreuses intoxications liées à l’emploi massif de gaz lacrymogène et poivré

Les pompiers ayant évacué la personne ont été bloqué par les gendarmes qui leur ont refusé l’accès et ne les ont laissé passer qu’après l’insistance d’occupants présents. Ils ont de nouveau empêché leur départ afin de contrôler la personne blessée, retardant en tout plus de vingt minutes la pris en charge des secours.

Une occupation militaire ne s’installe jamais sans violence. Cette liste non-exhaustive ne voudrait pas oublier toute la violence psychologique d’un tel déploiement policier ainsi que celles subies au quotidien dues à leur présence permanente et leurs agissements.
[Source : ZAD]

Une action du comité de soutien de Brest, le 15 avril :

Des militants anti-OGM pénètrent sur un site de Monsanto dans l’Aude
Une centaine de militants anti-OGM sont entrés lundi matin 15 avril sur un chantier d’agrandissement du site du géant américain Monsanto à Trèbes, dans l’Aude, pour tenter de vérifier que ne s’y trouvait pas du maïs transgénique. Mais ils ont été empêchés par les gendarmes de pénétrer dans les locaux de l’entreprise proprement dits. Les forces de l’ordre, visiblement prévenues de l’action qu’entendaient mener les militants hostiles au recours aux organismes génétiquement modifiés, se trouvaient sur les lieux à leur arrivée, a pu constater un photographe de l’Agence france-presse.
Les anti-OGM voulaient mener "une inspection citoyenne pour vérifier que le site n’abritait pas le maïs OGM MON 810 du groupe américain, interdit en France", a déclaré un des participants, Jacques Dandelot.

CONTRE LE PROJET D’EXTENSION

En janvier 2012, les militants anti-OGM avaient découvert sur le site des sacs de maïs MON 810, ce qui avait poussé le gouvernement de l’époque à annoncer l’interdiction de leur culture.

Les militants entendent aussi protester contre le projet d’extension du groupe américain de ses installations à Trèbes. Ils ont déployé des banderoles sur le chantier d’agrandissement sur lesquelles on pouvait lire : "OGM = menace sur tout le vivant" et "60 silos en plus = plus de pesticides et moins d’abeilles"

Deux organismes génétiquement modifiés seulement ont été autorisés à la culture dans l’Union européenne : la pomme de terre Amflora, développée par le groupe allemand BASF, qui s’est avérée être un échec commercial, et le maïs OGM MON 810.

La culture du MON 810 a été autorisée en 1998 pour dix ans. Monsanto a demandé le renouvellement de ce permis en 2007, mais le processus d’autorisation est gelé en raison de l’hostilité de plusieurs États. Huit pays – France, Allemagne, Luxembourg, Autriche, Hongrie, Grèce, Bulgarie et Pologne – ont adopté des clauses de sauvegarde pour interdire sur leurs territoires la culture des organismes génétiquement modifiés autorisés.

[Source : Le Monde]

Extrait des prises de paroles à Sème Ta Zad (13/04/2013) :
Construire là où ils veulent détruire, cultiver là où ils veulent bétonner, voilà notre manière de lutter et voilà ce que nous ferons tous et toutes ensemble aujourd’hui ! "Sème ta ZAD !" est aussi une manière de voir loin, d’imaginer ce que sera la zone après l’abandon définitif de leur grand projet inutile et imposé. Parce que nous luttons contre un aéroport mais aussi contre le monde qui va avec, nous aurons à faire aux aménageurs en tous genres qui spéculent sur les terres nourricières, nous aurons à faire aux agriculteurs intensifs qui cherchent à s’agrandir toujours plus... Avec « Sème ta ZAD ! » nous voulons mettre en place dès maintenant une communisation des terres et des pratiques, nous prenons la terre et nous la garderons !

La manifestation « Sème ta ZAD ! » ne surgit pas de nulle part. Nous voulons rappeler qu’elle prend racine dans une histoire et dans la mise en place de pratique collective de lutte. Le 7 mai 2011, déjà outils en main et tracteurs en tête, nous étions plus d’une centaine à mener le défrichage de la ferme maraîchère du Sabot. Déjà il y avait dans l’air comme une atmosphère joyeuse de jacquerie et de partage. Au moment des expulsions, les tracteurs ont constitué un vrai renfort matériel. Ainsi on a pu voir la nuit pousser des barricades gigantesques pour faire face à la pluie de lacrymogène qui arrosaient les légumes du Sabot. Avec les paysans, nous avons défendu la ferme du Rosier, un peu plus tard les tracteurs se sont enchaînés autour de la Châtaigne, puis par une belle nuit étoilée de janvier, les paysans ont commis l’irréparable : ils sont devenus squatteurs à leur tour ! Ils ont occupé et occupent encore la ferme de Bellevue pour la sauver de son imminente destruction. Au-delà des moments de lutte, cette manifestation a aussi pris forme au sein des assemblées agricoles qui se réunissent régulièrement à la Châtaigne depuis fin novembre. Parce que l’autonomie alimentaire et la répartition des terres ne concerne pas que les paysanNEs, ces assemblées regroupent toutE opposantE qui veut porter la lutte à travers une pratique agricole.

Avec nos différences nous nous sommes accordés sur des principes communs :

sur la dénonciation des grandes concentrations agricoles et la défense de l’accès à la terre pour les projets d’installation paysanne, à Notre-Dame-des-Landes et partout ailleurs.
sur l’entraide, la mutualisation des moyens et des outils pour favoriser l’installation collective.
sur l’apprentissage par l’échange et le dialogue entre savoir-faire agricole traditionnel et pratiques expérimentales, entre professionnelLEs et paysanNEs hors cadre.
sur la nécessité de développer et démultiplier des projets d’agriculture vivrière locale pour promouvoir l’autonomie alimentaire contre l’agro-industrie et contre l’artificialisation des terres.

Aujourd’hui, en écho à la journée mondiale des luttes paysannes, qui aura lieu le 17 avril prochain, nous voulons faire de cette manifestation un acte politique fort. Rappelons que cette journée mondiale commémore le massacre du 17 avril 1996 où des hommes et des femmes du Mouvement des travailleurs ruraux et paysans sans terre du Brésil avaient bloqué une route pour exiger l’expropriation de terres en friche et la mise en place d’une réforme agraire. La police militaire avait alors tiré à bout portant sur la foule : bilan 22 morts et 70 blessés. Ici comme ailleurs, nous avons recours à l’occupation comme pratique de lutte pour défendre ce bien commun qu’est la terre. Ce type d’action directe, à la fois illégale et légitime, est notre unique rempart pour stopper sur le terrain l’avancée du désert dans le bocage, un désert de béton qu’ils nous présentent comme une oasis. C’est en nous réappropriant la terre et en la cultivant que nous voulons la défendre, c’est par l’occupation que nous voulons nous opposer frontalement à l’accaparement des terres. Nous serons là à nouveau le 27 avril à Avignon pour la manif-occupation contre le saccage de 50 ha de terres nourricières. Partout où ils aménagent, où ils modernisent, où ils bétonnent et urbanisent, nous nous organisons. Parce que notre monde n’est pas le leur et parce qu’ils sèment le désert, ils récolteront la révolte et la lutte.
[Source : ZAD]

[Source : Cannabis Sans Frontières]

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