[ [ [ Policiers infiltrés à Lyon - Yannis Lehuédé

À Lyon comme à Paris, les bassidjis de Sarkozy se font voir – et filmer. Part essentiel du dispositif de répression, ils représentent parfois une bonne moitié des troupes mises sur le terrain par les Préfets. Officiellement chargés d’arrêter les casseurs, ils sont en fait là pour provoquer la casse, semer l’insécurité dans les manifestations, et tâcher d’entraîner des manifestants afin d’en arrêter le plus possible. Leur degré de violence est d’autant plus grand qu’ils se mettent en danger eux-mêmes, risquant à tout moment d’être pris à partie par la foule. Ce serait pour limiter ce risque qu’ils ne se déploient généralement qu’en groupes assez nombreux pour se protéger mutuellement. Comme en Iran, les bassidjis.

Jacques Gérault a reconnu que « deux policiers avaient un écusson CGT » lors de la manifestation du 19 octobre à Lyon.

Dans l’édition de ce mercredi du journal Libération, Bernard Thibault, le secrétaire général de la CGT a dénoncé les policiers « camouflés sous des badges syndicaux » à Lyon, le 19 octobre. Mercredi soir, le préfet a reconnu l’existence de ces policiers infiltrés « par tradition ». Il a toutefois demandé l’ouverture d’une enquête interne.

Ce mercredi soir, au cours d’une conférence de presse exceptionnelle sur le bilan des violences urbaines de la semaine dernière, le préfet du Rhône, Jacques Gérault, a tenté d’éteindre la polémique réactivée par les propos du secrétaire de la CGT sur les policiers déguisés en cégétistes, lors de la manifestation lyonnaise du 19 octobre.

Dans un entretien paru dans le journal Libération, Bernard Thibault n’a en effet pas mis de gants ce mercredi matin pour dénoncer certaines pratiques policières relevées par plusieurs témoins, en marge des manifestations parisiennes et lyonnaises contre la réforme des retraites :

« La présence de policiers en exercice camouflés sous des badges syndicaux, à Lyon […] ne fait aucun doute. […] On a vu des policiers avec des badges CGT repérés par les nôtres, qui se réfugient dans un hall d’immeuble, et finissent par se faire exfiltrer par des CRS. »

Une semaine après les scènes d’émeutes au centre-ville de Lyon, Bernard Thibault fait référence à la scène que plusieurs témoins et un photographe de presse nous ont rapportée, au moment où pierres et grenades lacrymogènes commencent à s’échanger place Bellecour, après l’arrivée de la manifestation intersyndicale sur les retraites. (Voir la vidéo sur le site de Rue 89, par exemple.)

Mercredi soir, le préfet du Rhône [un proche de Nicolas Sarkozy dont il a été le collaborateur au ministère de l’Intérieur, ndlr], a reconnu l’existence d’au moins « deux policiers qui avaient un écusson CGT ». Il s’agit de policiers qui travaillent en civil mais « ne sont pas de la BAC ».

Il a immédiatement justifié cette pratique :

« C’est la tradition que des policiers soient infiltrés dans la population. Ils le font couramment. »

Le préfet, qui dit ne l’avoir appris que mardi matin, a toutefois « demandé une enquête pour savoir si c’était conforme à la déontologie ou pas. Une enquête menée par les instances normales de la DGPN (Direction générale de la police nationale). »

Le patron de la police lyonnaise parlait de « mythomanie »

Jacques Gérault a tenu à ajouter :

« Deux de ces policiers ont sauvé la vie de personnes lors de prise d’otages et ont eu la médaille pour les actes de courage et de dévouement. »

Au soir même des faits, Lyon Capitale avait pourtant interrogé Albert Doutre, le directeur départemental de la sécurité publique, patron de la police lyonnaise. Celui avait nié en bloc, parlant de « mythomanie » alors que nous lui faisions part de plusieurs témoignages concordants.

Une situation qui amène Lyon Capitale à republier le témoignage enregistré le jour des faits d’une manifestante, Lucie, non-syndiquée. Elle était présente place Bellecour le mardi 19 octobre vers 13 heures. Elle a raconté avoir vu :

« […] une dizaine de policiers en civil qui portaient des autocollants de la CGT. Ils ont arrêté des manifestants vers la librairie Privat. Ils ont pu stocker ces manifestants dans l’entrée d’un immeuble, au numéro 19.

Pendant leur manège, des pompiers syndiqués à la CGT les ont vus et leur ont arraché les autocollants tandis qu’un attroupement se formait. Quelques minutes plus tard, les policiers en civil, aidés par les CRS, ont fait une sortie, poursuivis par des manifestants. »

C’est ce qui a contribué, selon Lucie, a échauffer les esprits place Bellecour le 19 octobre.

« Créer un climat de tension »

Sur la vidéo ci-dessus, postée sur le site internet Rebellyon.info, nous distinguons des hommes vêtus de noirs (les policiers en civil de la BAC, selon les témoins), l’intervention des pompiers et l’exfiltration par des gendarmes mobiles.

Dans son entretien à Libération, Bernard Thibault concluait :

« Des manipulateurs s’infiltrent et poussent au crime dans des piquets de grèves, des manifestations, des occupations de ronds-points, violentent les situations en fin de manif pour avoir des images chocs pour la télé et créer un climat de tension. »

[Source : Lyon capitale, rue 89]

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