Jeudi 21 août 2014 à 21h, Abdelhak Goradia est décédé alors qu’il était conduit par la police à l’aéroport Roissy Charles de Gaulle pour être expulsé vers l’Algérie. A 19h, Abdelhak Goradia se portait parfaitement bien et 2 heures plus tard, il était mort…
Premier réflexe de la presse, publier les dires de la police selon lesquelles l’homme de 51 ans était mort d’une crise cardiaque. Tout en déshonorant le mort et en insistant sur le fait qu’il avait plusieurs fois eu à faire à la justice... Une manière plus ou moins efficace mais néanmoins récurrente de traiter la mort d’un sans-papier .
Les premières informations publiées parlaient "d’une crise cardiaque", laissant entendre que l’homme de 51 ans avait des problèmes de santé... "En arrivant à Roissy, les policiers se sont aperçus qu’il était en train de faire un malaise dans le fourgon, et malgré les secours prodigués, il est décédé d’une crise cardiaque" ( France tv info)
Finalement «Selon les premiers résultats de l’autopsie, la mort a été provoquée par une asphyxie due à une régurgitation gastrique», a déclaré un porte-parole du parquet" ( Libération). Son neveu et des proches ont vu le corps à la morgue -du moins uniquement le visage- qui, dirent-ils portait des traces de plusieurs hématomes.
Vendredi, le parquet de Bobigny a ouvert une information judiciaire pour "homicide involontaire". Estimant qu’il s’agit d’un décès "a priori accidentel", il a chargé un juge d’instruction de mener l’ensemble des investigations.
La famille d’Abdelhak Goradia,- père d’un enfant (français) de six ans- qui compte une vingtaine de personnes en France, souhaite se porter partie civile pour connaître les circonstances exactes de sa mort, ont précisé ses proches.
En parallèle, l’Inspection générale de la police nationale (IGPN), la "police des polices", a été saisie d’une enquête dès jeudi soir.
Au centre de rétention de Vincennes d’où est parti contre son gré Abdelhak Goradia, jeudi 21 aôut, les retenus du bâtiment 1 se sont mis en grève de la faim.
Deux témoignages ont été publiés sur le site Paris-luttes-info, montrant la façon dont la police use afin de contraindre un retenu à l’embarquement:
« Vers 18h, les flics ont dit à Abdelhak qu’il devait aller voir l’infirmière. En fait, c’était faux. Il est sorti de sa chambre, ils l’ont emmené à l’accueil et lui ont mis les menottes. A l’accueil, on entendait des bruits étranges, des bruits bizarres. Les gens qui étaient aux visites [au-dessus de l’accueil] ont tout entendu. Les flics lui ont mis une cagoule, un masque sur la tête. Les flics savaient qu’il allait refuser. Lors de la première expulsion ils lui avaient dit « Vous allez devant le juge ». En fait, ils l’ont emmené à l’aéroport. Il n’était pas d’accord, il a protesté et ils l’ont ramené au centre.
Hier, toute la nuit, on l’a attendu parce qu’on savait qu’il allait refuser. Son cousin a téléphoné, il était inquiet. Et puis ce matin, il nous a rappellés et il nous a dit qu’il était mort. Du coup, on fait la grève de la faim. »
« On est stressé parce qu’Abdelhak est mort. Son nom n’était pas affiché sur le tableau des expulsions. Il l’on appelé quand on était en train de faire la prière vers 18h. Dès qu’on a fini, il est descendu soi-disant parce qu’il avait une visite. Dans un local de l’accueil, les flics l’ont frappé. Ils lui ont mis un casque, des menottes aux poignets et lui ont entravé les jambes. Les flics savaient qu’il allait refuser, alors ils ont fait la force avec lui. Ils avaient tenter de l’expulser une première fois le quatrième jour après son arrivée.
Il ne savait pas comment ça se passait. Il est parti tout seul, dans une petite voitrure voir le juge et pas dans une camionnette comme habituellement. Déjà les flics l’avaient menotté aux jambes et aux poignets, il a refusé l’expulsion. Dès la première fois, ils ont fait la force, ils avaient la rage contre lui. Ils font n’importe quoi avec nous ! Même ses affaires sont encore ici, son portefeuille, sa veste…
J’arrive pas à dormir, je stresse. Il dormait sur un matelas par terre, à coté de moi, je voyais sa tête. Et maintenant son matelas est vide, ça me stresse. On était décidé à tout brûler. J’ai vu la dame de l’ASSFAM et j’ai pleuré. On a décidé de faire la grève de la faim."
Ils ont par ailleurs écrit un communiqué égalment reproduit sur le site Paris-luttes-infos :
Nous, retenus du bâtiment 1 du CRA de Vincennes, demandons :
que des journalistes puissent venir voir les conditions de vie dans le centre
que les acteurs des violences envers M. Goradia soient punis, car ils l’ont tabassé à mort
que la durée de rétention soit réduite à 20 jours car il y a trop de violences. Ce n’est pas la peine, 45 jours, ça ne sert à rien
que la nourriture soit améliorée. On mange très mal alors qu’on n’a pas demandé à être ici
une partie de la police est très agressive verbalement et fait des provocations. Ils vont jusqu’à dire des insultes dans le micro. Ils hurlent et font des gestes obscènes.
On ne négociera pas.
On continuera la grève de la faim tant que nos revendications ne seront pas satisfaites.