[ [ [ Philippe Rey, un préfet zélé au service de la machine à expulser - Yannis Lehuédé

Philippe Rey, préfet des Pyrénées-Atlantiques, est un homme très scrupuleux.
Après avoir poursuivi pour outrage des citoyens qui dénonçaient les rafles
de sans-papiers, après avoir demandé au tribunal administratif de cacher à
la vue du public la “fresque des expulsés” de Billère (64), voilà qu’il
vient d’interdire à Patrick Peugeot, président de la Cimade, l’entrée du
centre de rétention d’Hendaye. [1]

Le président de la Cimade, nouvelle victime du zèle du Préfet

http://www.PaysBasqueInfo.com

C’est une première dans l’hexagone : le président de la Cimade, Patrick
Peugeot, s’est vu refuser samedi matin l’accès au Centre de rétention
d’Hendaye. Motif invoqué, une interdiction préfectorale de laisser pénétrer
le président de cette association pourtant dûment habilitée à visiter les
lieux. Une interdiction qui pointe une nouvelle fois le zèle d’un préfet qui
s’est déjà distingué pour avoir outrepassé ses droits, notamment dans sa
gestion du dossier des reconduites aux frontières.

Après avoir tenté de présenter des ressortissants étrangers devant le
tribunal de Toulouse pour contourner une jurisprudence dans les
Pyrénées-Atlantiques, ou de faire effacer une fresque érigée à Billère en
mémoire des familles sans papiers expulsées, le préfet des
Pyrénées-Atlantiques Philippe Rey a été respectivement par deux fois,
rappelé à l’ordre par la justice. Lors du procès de Laborantza Ganbara, son
intervention en dehors du cadre de la loi avait déjà été soulignée par
l’avocat de l’association, maître Jean-René Etchegaray.

On peut une nouvelle fois s’étonner de cette consigne préfectorale, alors
même que Patrick Peugeot, président de la Cimade, recevait la veille un
courrier du ministre de l’immigration Eric Besson, confirmant l’attribution
des visites des centres de rétention dans le département à la Cimade, selon
la nouvelle carte établie au 1er janvier 2010.

Pour Laurence Hardouin, présidente de la Cimade à Bayonne, ce refus est « 
révélateur de ce que l’on subit ici ». « L’année s’achève et les quotas de
reconduite aux frontières ne sont pas atteints » explique Laurence Hardouin,
qui accuse le Préfet d’avoir « voulu éviter que nous constations que des
gens ont été arrêtés alors qu’ils rentraient chez eux, ce que nous dénonçons
constamment ».

Philippe Rey n’aime pas qu’on parle de « rafles à la sortie des écoles »

Après avoir poursuivi pour outrage un médecin, Eric Soarés, qui lui avait
écrit : « Je tombe des nues, j’apprends que l’on autorise l’enfermement
d’enfants, cela me rappelle une triste époque où l’on mettait les enfants
dans des wagons », Philippe Rey décide de poursuivre pour le même délit
Valérie Martinez qui lui a écrit en juillet 2008, suite à la mise en
rétention de la famille Kuka à Hendaye : « Je soutiens l’action de RESF,
cessez les rafles à la sortie des écoles, halte à l’ignominie de
l’enfermement des enfants. » [2]

et il n’aime pas “la fresque des expulsés” de Billère

Le maire de Billère, commune de l’agglomération paloise, a fait recouvrir la
façade d’une salle communale d’une fresque « destinée à rappeler le souvenir
des enfants expulsés du département avec leurs parents étrangers en
situation irrégulière ». Lors de son inauguration, le 5 septembre 2009,
Jean-Yves Lalanne, maire de Billère, a déclaré : « Cette fresque est
désormais là pour rappeler ces enfants et ces familles expulsés, pour
effacer notre honte qu’un gouvernement mène cette politique au nom de notre
République ».

Dans le cadre de sa mission de contrôle de la légalité des actes des
collectivités territoriales, le préfet a déposé un recours contre cette
initiative, au motif que le maire n’aurait pas consulté le conseil municipal
avant de prendre sa décision.

Le 2 octobre 2009, le tribunal administratif de Pau a rejeté la requête en
référé du préfet, qui lui demandait d’enjoindre au maire de Billère de « 
cacher à la vue du public par tous moyens » la “fresque des expulsés”. Il a
examiné l’affaire sur le fond, le 4 janvier 2010.


"Mur des expulsés" à Billère : le rapporteur public en faveur de l’effacement

[AFP – le 4 janvier 2010 – 13:31 ]

Le rapporteur public s’est prononcé lundi devant le tribunal administratif
de Pau en faveur de l’effacement du "mur des expulsés", une fresque murale
peinte à Billère, à côté de Pau, dédiée à la mémoire des sans-papiers
expulsés et leurs enfants.

La juridiction administrative a mis sa décision en délibéré au 12 janvier.
La peinture murale extérieure, baptisée "mur des expulsés" depuis son
inauguration le 5 septembre en présence et avec l’approbation du maire
socialiste Jean-Yves Lalanne, avait conduit le préfet des
Pyrénées-Atlantiques, Phlippe Rey, à l’assigner en référé pour être, selon
lui, sorti de son "devoir de neutralité" vis-à-vis de la politique
gouvernementale. À l’audience de lundi, l’argumentation du préfet a été
reprise par le rapporteur public qui avait notamment estimé qu’il fallait
"respecter la neutralité des édifices publics", a constaté un correspondant
de l’AFP. La peinture, exécutée sur le mur d’une salle des fêtes communale,
avait été réalisée sans consultation préalable du conseil municipal de
Billère, avait en outre assuré le préfet. Le juge des référés de Pau, saisi
le 2 octobre dernier, avait "rejeté l’urgence" d’un éventuel jugement dans
ce sens, laissant au tribunal administratif le soin de se prononcer sur le
bien-fondé de la demande. Me Jean-François Blanco, avocat du maire de
Billère, qui avait demandé un dépaysement de l’affaire, avait également
souhaité un report de l’audience en raison d’un déplacement prévu à
l’étranger cette semaine. Les deux demandes ont été rejetées par le tribunal
administratif qui a annoncé lundi la mise en délibéré de l’affaire en
l’absence de Me Blanco, a souligné un responsable à la mairie de Billère.


Pour mémoire, il y a 18 mois...

Une famille kosovare expulsée en minicharter

par Matthieu Ecoiffier,
Libération, le 9 août 2008.

Arrêtée jeudi à 6 h 30 à Pau, la famille Sylejmani a atterri dès 14 h 30 à
Pristina au Kosovo. Le préfet des Pyrénées-Atlantiques a eu recours à un
petit avion d’une dizaine de places pour « reconduire à la frontière »
Kirimane la mère, Afrim, le père, Alma, 10 ans, et Drenusha, 8 ans, leurs
filles, et Albin, 5 ans, le petit dernier.

Albanais du Kosovo, les Sylejmani ont fui leur pays au printemps 2007 par
crainte d’être inquiétés : le père avait refusé de s’engager dans la guerre
civile aux côtés de l’UCK, actuellement au pouvoir. C’est devant le centre
de rétention de Hendaye, où ils les croyaient retenus, que leurs amis de
RESF 64 et une poignée d’élus qui les ont parrainés le 4 juillet ont appris
leur expulsion. Par un coup de fil de la mère, dont le témoignage faisait la
une vendredi de la République des Pyrénées : « Ici, j’ai peur. Nous ne
sommes pas en sécurité avec nos enfants. Dans deux ou trois jours, nous
devons partir du Kosovo. »

« On ne s’attendait pas à ce qu’ils soient directement renvoyés à Pristina !
C’est une famille bien intégrée. Le père a une promesse d’embauche dans le
bâtiment et les trois gamins sont scolarisés. Albin, dont je suis le
parrain, a vu son père menotté pendant tout le vol », s’indigne Olivier
Dartigolles, élu palois et porte-parole du PCF. Et il dénonce « une
opération commando et une débauche de moyens. Deux parents, trois enfants et
cinq policiers dans un avion c’est la France, ça ? » « C’est un minicharter,
spécialement affrété pour eux, une honte », dénonce Fred Espagnac,
conseillère municipale socialiste à Pau et collaboratrice de François
Hollande.

Ce « coup d’éclat » fait suite à un bras de fer entre les élus de gauche, le
Réseau éducation sans frontières (RESF) et le nouveau préfet Philippe Rey
[En vacances depuis début août, le préfet a refusé de répondre à nos
questions.]. Réputé « sarkozyste de choc », selon un élu, il « vient d’être
nommé dans les Pyrénées-Atlantiques après avoir suscité une levée de
boucliers des élus de tout bord en Bretagne. C’est sa deuxième expulsion en
un mois. Il a été vexé parce que la première a échoué. On a fait libérer les
Kuka pour non-respect des procédures », explique un élu.
Cette fois, le préfet a décidé de les prendre de vitesse en zappant l’escale
dans le centre de rétention.

Leur demande d’asile ayant été rejetée en appel, les Sylejmani devaient se
présenter le 25 septembre pour un réexamen de leur cas devant l’Office
français des réfugiés et apatrides (Ofpra). « Ce recours n’est pas suspensif
de la mesure d’éloignement, précisait-on à la préfecture. La règle c’est le
départ tout de suite. Et le placement en rétention l’exception. »

P.-S.
Pour en finir avec le délit d’outrage, signez la pétition en ligne hébergée
sur le site de la LDH :

http://www.ldh-france.org/

Notes
[1] Deux sources d’informations biographiques concernant le préfet Philippe
Rey :

•Sa biographie officielle, sur le site internet de la préfecture des
Pyrénées-Atlantiques :

http://www.pyrenees-atlantiques

•La page qui lui est consacrée sur le site du Collectif pour la
dépénalisation du délit d’outrage (CODEDO) :

http://codedo.blogspot.com/

d’où provient cette brève présentation.

[2] Référence :

http://codedo.blogspot.com/

LDH TOULON

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