[ [ [ Création du CIGEM à Bamako - Yannis Lehuédé

Le Centre d’Information et de Gestion des Migrations (CIGEM), basé à Bamako ouvrira ses portes au mois de septembre 2008.

Le Centre d’Information et de Gestion des Migrations est un projet pilote de l’U.E., financé par le Fond européen. Le budget alloué au Centre pilote est très important : 10 millions d’euros sur trois ans financés sur le IXè FED, dont 4 millions de frais de structure. Ce projet mobilise ainsi les deux tiers de l’enveloppe dévolue à l’Afrique de l’Ouest sur le IXè FED au titre de la question des migrations. C’est dire l’importance que l’UE accorde à ce projet.

Un document promotionnel publié le 22.08.2007 présentait le Cigem ainsi :

« L’objectif général du projet est la définition et la mise en œuvre d’une politique migratoire malienne adaptée aux dynamiques nationales, régionales et internationales en constante évolution, mettant un accent particulier sur le lien entre migrations et développement. L’objectif spécifique est la mise en place d’un Centre d’Information et de Gestion des Migration (CIGEM), qui aura pour missions :

  • l’amélioration de la connaissance des phénomènes migratoires
  • l’accueil, l’information, l’orientation et l’accompagnement des migrants potentiels et des migrants de retour
  • l’information sur les conditions juridiques de la migration et la sensibilisation de la population pour la prévention de la migration clandestine
  • la valorisation du capital humain, financier et technique des Maliens de l’extérieur Le Centre aura une vocation nationale affirmée, mais il constituera aussi une expérience pilote qui pourrait trouver un écho au sein d’autres Etats membres de la CEDEAO. »

Un dangereux instrument au service du contrôle de l’émigration Africaine ?

« Coquille vide ou dangereux instrument au service de la France et de l’Espagne membres de son comité de pilotage ? » S’interroge la Cimade dans sa revue Causes Communes du mois de juin 2008.

Un document du sénat, soulignait en 2007 l’ambigüité du projet Cigem. Certes notaient les rapporteurs, les objectifs affichés par le projet « sont l’amélioration de la connaissance des flux migratoires, l’accueil, l’information, l’orientation des migrant potentiels et des migrants de retour, l’information sur les conditions juridiques de la migration et la sensibilisation de la population pour la prévention de la migration clandestine et la valorisation du capital humain, financier et technique des Maliens de l’extérieur. Cette structure à vocation à s’étendre dans la région et à la CEDEAO ».
Mais les rapporteur s’interrogeaient : « Si la recherche sur les migrations est effectivement indispensable du fait de l’imprécision et de la faiblesse des connaissances sur ce sujet, les autres volets des missions du Cigem sont pas dépourvus d’ambiguïtés.
Les opportunités de migration légale vers l’Europe sont forcément limitées. L’objectif du Centre est par conséquent davantage de décourager la migration illégale que d’offrir des possibilités de migration légale. L’Espagne gère déjà avec beaucoup de prudence l’ouverture de son marché du travail aux ressortissants des nouveaux États membres de l’Union européenne, elle n’est pas en mesure de faire des propositions concrètes aux candidats maliens à l’émigration. Quant à l’implication d’autres partenaires européens dans le CIGEM, elle s’annonce très mesurée. La coexistence de la nouvelle structure avec la maison des maliens de l’extérieur ne peut qu’entretenir des espoirs qui seront forcément déçus. (…) Ce projet, emblématique de l’approche globale des migrations, risque de souffrir de ses contradictions d’origine, qui ne sont surmontées qu’au prix d’une ambiguïté dommageable. »

Tranchant avec les interrogations policées des sénateurs la Cimade dénonce la duplicité constitutive du Cigem.

« Il est certain que ce centre, vendu comme un instrument de coopération au service du gouvernement malien et qui, à terme, deviendra une agence malienne, permettra de mettre en application les accords de gestion concertés des flux migratoires. Ces accords, en cours de négociation entre la Espagne et le Mali – et déjà passés avec l’Espagne – visent à échanger migrants expulsés (délivrance de laissez-passer) contre quotas de migrants saisonniers, sous couvert d’une approche concertée de la gestion des flux migratoires. Loin de promouvoir les intérêt mutuels des parties, ce projet est une effrayante illustration du mépris des Etats membres de l’UE. »

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