[ [ [ La « régularisation » par l’emploi n’en est pas une ! Danger pour les (...) - Yannis Lehuédé

Une rumeur court en ce moment
parmi les sans-papiers, et parmi les
employeurs ou employeurs potentiels
de sans-papiers : la réforme de la loi
sur l’immigration du 20 novembre
dernier permettrait la régularisation
des étrangers qui travaillent ou qui
détiennent une promesse d’embauche.

Or malgré les annonces faites par le
gouvernement, non seulement on est
loin d’une telle régularisation sur la
base du travail, mais la disposition à
l’origine de cette rumeur, qui a été
introduite – d’ailleurs dans la plus
grande des discrétions – par la loi
Hortefeux, pourrait s’avérer être un
véritable piège pour les personnes en
situation irrégulière.

La disposition en question donne désormais
la faculté aux préfectures de
délivrer un titre de séjour à des étrangers
qui exercent une profession
connaissant des problèmes de recrutement.
Mais le seul fait de travailler – et de
pouvoir justifier d’un emploi – ne
donnera aucunement un droit automatique
à une carte de séjour.

Les préfectures useront dans le traitement
de ces dossiers, comme elles en
ont l’habitude, de leur pouvoir discrétionnaire.
D’ailleurs, la nouveauté se niche dans
une partie du CESEDA (Code de
l’entrée et du séjour des étrangers et
du droit d’asile) qui le dit explicitement
 : il s’agit d’une « admission
exceptionnelle au séjour ». Parler ici de
« régularisation » est une contrevérité.
Mais il y a pire. Le dispositif n’est pas
encore opérationnel ; il ne le sera
qu’après l’adoption de la liste des professions
décrétées « sous tension ». On
pouvait espérer par réalisme que cette
liste épouse les métiers exercés de fait
par les sans-papiers. Et bien non !

On
a appris, via une « fuite » dans le journal Libération du 29 octobre 2007,
qu’il y aura deux listes, l’une réservée
aux ressortissants des derniers pays
entrés dans l’Union européenne,
comprenant plus d’une centaine de
professions peu qualifiées (celles
exercées bien souvent par des travailleurs
sans autorisation de travail), et
une autre, plus courte, de métiers exigeant
pour la grande majorité d’entre
eux des diplômes de l’enseignement
supérieur, qui sera celle applicable
aux non communautaires. L’étau se
resserre, et les chances pour les sanspapiers
d’être admis (exceptionnellement)
au séjour d’autant…

Depuis l’annonce d’une possible régularisation
par le travail, en tous cas,
beaucoup d’étrangers se précipitent
dans les préfectures.
Certains ont déjà fait l’objet d’interpellations
au guichet et d’un éloignement
du territoire. Les reconduites à
la frontière sont facilitées par le fait
que beaucoup parmi les personnes
concernées sont célibataires, et souffrent
davantage d’isolement. Après le
fichage des familles favorisé par la
prétendue régularisation de juin
2006, s’opère celui des étrangers célibataires.

Une aubaine pour atteindre
et dépasser les objectifs affichés de
25 000 expulsions pour l’année ! Ces
expulsions sont peut-être, malgré les
discours sur l’immigration de travail,
la principale ambition de la politique
migratoire du gouvernement ?
Le Gisti tient à alerter les sanspapiers
et tous ceux qui les soutiennent
 : il est important qu’ils ne se rendent
pas dans les préfectures tant que
les listes de métiers ouverts ne sont
pas parues, et même alors de ne pas s’y
rendre sans s’être renseigné auprès
d’une association ou d’un syndicat.

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