[ [ [ Liberez Kébé ! - Yannis Lehuédé

Kébé Talibé, soutien très actif de
RESF Montreuil, a été arrêté le 31
octobre en fin de matinée à la gare de
Bordeaux Saint-Jean, en prenant le
train pour revenir en région parisienne,
où il devait reprendre la tête
des initiatives de régularisation du
Collectif.

Le Lundi 5 novembre à 10h30, Kébé
est passé devant le juge du Tribunal
administratif pour l’examen de son
recours contre l’ARPF (arrêté préfectoral
de reconduite à la frontière).
Malheureusement, l’appel de la décision
du juge des libertés et le recours
au tribunal administratif ont tous les
deux été rejetés, malgré une très forte
mobilisation (une centaine dans la
salle du TA) qui s’est élargie dans la
journée.

Il est donc expulsable à tout moment.

Les lois sur l’immigration se succèdent
 : en 2003, 2006 et 2007. Avec
chacune, les conditions d’accès au
droit de vivre en famille, au droit à
l’éducation, au droit d’asile, sont
devenues sans cesse plus contraignantes.

La politique du chiffre contraint
les préfectures et les forces de police à
oublier les réalités humaines pour se
concentrer sur des quotas d’expulsion
sans cesse plus élevés.

À la préfecture de Seine Saint-Denis,
comme ailleurs, nous le constatons
tous les jours : même le « cas par cas »
n’existe plus :

– Avec la restriction des possibilités
d’entrée et de séjour, les cas de séjour
irrégulier se multiplient et le nombre
d’étrangers expulsables augmente
sans cesse ;

– Les droits fondamentaux deviennent
inaccessibles, l’administration
est poussée à oublier les réalités
humaines et la police n’a plus qu’une
consigne : faire du chiffre.

Cette logique répressive, suivie au
nom d’intérêts politiques à court
terme et d’une idéologie xénophobe,
s’accompagne d’une volonté de réprimer
les sans papiers les plus actifs quiluttent pour la régularisation comme
les citoyens qui affirment leur solidarité
avec les étrangers.

Talibé Kébé en fait partie et risque
d’être expulsé d’un jour à l’autre par
la préfecture de Gironde. Cet ivoirien
originaire du Nord risque d’être jeté
en prison dès son arrivée à Abidjan.
Vingt-sept militants du Collectif pour
les droits des sans-papiers (CDSP) de
Montreuil ont été arrêtés lundi 11
novembre après leur évacuation de la
préfecture de Bobigny où ils réclamaient
la libération d’un porte-parole
retenu à Bordeaux.

À l’exception
d’une personne interpellée pour des
violences présumées sur un policier
qui a reçu un coup de mégaphone
ayant entraîné sept jours d’incapacité
totale de travail, les autres ont été
arrêtés pour avoir occupé une terrasse
en étage de la préfecture durant plus
de trois heures. Arguant de là “l’extrême
dangerosité” de la situation
(des militants étaient juchés sur une
corniche d’où ils menaçaient de sauter),
le préfet avait demandé leur évacuation.

Ils risquent des poursuites
pour “organisation d’une manifestation
sans déclaration préalable”, “participation
à un attroupement non
autorisé après ordre de dispersion” et
“refus de se soumettre à une signalisation”,
car ils refusent de donner leurs
empreintes en garde à vue afin de les
identifier, selon la source judiciaire.

La plupart n’ont pas de papiers sur
eux, selon la même source.

Liste de revendications des occupants
 :
1. L’attitude de la Préfecture doit
changer :

• arrêt des refus d’enregistrement des
dossiers, au guichet ou par voie postale,

• amélioration des conditions d’accueil
des personnes et du traitement
de leurs dossiers,

• ouvertures de négociations avec
l’ensemble des organisations de
défense des sans papiers en Seine-Saint-Denis (CDSP Montreuil,
Coordination 93, Droits Devants !!,
9ème Collectif, Resf 93),

• prise en compte du travail des syndicats
en défense des travailleurs sans
papiers (notamment à travers le cas
d’OSP)

2. En ce qui concerne Talibé Kébé,
la Préfecture doit reconnaître et corriger
son erreur en lui permettant de
déposer de nouveau son dossier
auprès de ses services, de manière à ce
qu’il soit enregistré et que cessent les
poursuites injustes dont il fait l’objet
à Bordeaux.

Finalement, les manifestants placés
en garde à vue lundi 12 novembre
après avoir été évacués de la préfecture
de Bobigny ont été remis en
liberté le mercredi suivant.


Occupons bloquons tout ce que nous pouvons !

Kébé, c’est un ami, un camarade, un
voisin. Nous vivons, nous luttons
ensemble. Nous serons partout où
nous pourrons arracher sa libération.

Libérez-le !

Il va à la préfecture de Bobigny déposer
son dossier. Ce matin, comme des
centaines d’autres, il attend depuis
des heures l’ouverture du service des
étrangers.

Carte de séjour ou pas, tous doivent
passer par là, subir le même rite d’humiliation,
la même violence, le même
rappel à sa condition d’étranger.

Ensuite, il y a les guichets ou plutôt les
guichetiers qui trouvent toujours un
prétexte pour faire revenir le lendemain,
faire attendre des mois, des
années, maintenir dans l’illégalité…
Il est arrêté à la gare de Bordeaux.

Contrôle d’identité. Tous les jours, ces
contrôles se répètent dans la rue, dans
les gares, dans les foyers. Souvent discrets,
deux trois policiers postés ici ou
là. Un harcèlement qui ne veut pas
dire son nom, qui cherche à paraître
autre que ce qu’il est vraiment.

Personne n’est dupe. Une opération
organisée à grande échelle par l’État
contre une certaine catégorie de la
population, cela s’appelle une rafle :
ici permanente et diffuse.

Il passe devant le JLD (Juge des libertés
et de la détention). Cette impression
si banale que le juge n’est là que
pour valider une décision de police. La
loi, disent-ils. Ces lois réécrites tous
les deux ans qui fragilisent toujours
plus les populations étrangères, fabriquent
des sans-papiers, précarisent le
statut des étrangers en France (remise
en cause de la carte de dix ans, du
regroupement familial, du droit
d’asile) – un apartheid inscrit dans la
loi. La loi, disent-ils.

Il est mis en rétention. Des milliers de
personnes sont enfermées dans les
centres de rétention. Ces lieux qui là
encore ne veulent pas dire leur nom,
qui se cachent dans les sous-sols des
commissariats, dans les zones industrielles,
aux abords des aéroports, au
milieu des bois… On nous parle de
l’amélioration des conditions de
détention, d’espace pour enfants…

Mais il s’agit bien de camps dans lesquels
on est enfermé et aucun aménagement
d’aucun type n’enlèvera à ces
lieux leur violence. Violence de lieux
que les pays européens n’ont jamais
cessé de construire pour gérer les
populations étrangères.

25 000 expulsions cette année – on le
répète tous les jours à la télé, il faut
remplir le quota. Les préfets doivent
exécuter leur basse besogne sans mot
dire, comme ils l’ont toujours fait. On
ne compte plus les rendez-vous pièges
à la préfecture, les flics qui se font passer pour le conseiller d’orientation
pour donner un faux RDV aux
parents, les ANPE à qui on demande
de fournir les cartes de résidence aux
préfectures, les banques et les postes
qui balancent. La traque aux sanspapiers
est permanente, la peur
aussi… La peur c’est un mode de gouvernement
par lequel on oblige des
milliers de gens à bosser, à accepter
n’importe quel travail, pour n’importe
quel salaire, dans n’importe
quelle condition.

N’oublions pas que la fragilisation de
nos existences, la justice et la police
qui se resserrent chaque jour un peu
plus autour de nos vies est notre lot à
tous.

Résistons, donnons corps et
consistance au mouvement qui se
profile…

Occupons bloquons tout ce
que nous pouvons.

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