[ [ [ Marseille, capitale de la rupture ! - Yannis Lehuédé

Avant le lancement de la "Capitale de la Culture", quelques bruit circulaient sur la répartition des subventions à destination des quartiers Nord de Marseille - à savoir qu’une majorité des crédits destinés aux zones défavorisées iraient aux cadres des associations qui "pilotent" le projet, venus de Paris ou de partout sauf... de ces quartiers !

On avait ensuite entendu la grogne des acteurs locaux vis-à-vis du concert - payant, mais subventionné par 400 000 euros de fonds publics - d’un DJ mondialement connu... qui a finalement annulé sa participation.

Voilà ci-dessous un petit reportage de l’équipe du collectif "la Rabia del Pueblo " et de Keny Arkana, très enrichissant sur les projets à long-terme pour l’après "Marseille-Provence 2013" et concernant la réalité de l’attribution des fonds publics. Il étale aussi les tentatives de "nettoyage démocratique" des acteurs locaux des quartiers défavorisés.

À voir et à faire tourner !

Paris s’éveille

[Source : Keny Arkana]

Marseille, capitale de la culture : une partie de la scène rap se sent exclue

MARSEILLE (AFP) - Alors que Marseille vit depuis la mi-janvier au rythme des manifestations organisées dans le cadre de Marseille-Provence 2013, capitale européenne de la culture, une partie de la scène rap de la cité phocéenne dit sa frustration de ne pas y être mieux représentée.

D’IAM et la Fonky Family à 3e Oeil, Psy4 de la rime et Keny Arkana, Marseille a vu émerger depuis les années 1990 des artistes hip hop majeurs, qui ont conquis une audience nationale et parfois internationale.

Aujourd’hui, certains de ces rappeurs déplorent de n’être que peu associés à une manifestation culturelle qu’ils accusent de projeter une image biaisée de leur ville.

"Il y a (dans Marseille-Provence 2013, ndlr) une forme très triste d’ultra-snobisme provincial qui est horripilante", assène le rappeur Akhenaton, du groupe IAM, regrettant que "Marseille tourne le dos à ses enfants les plus talentueux".

Un point de vue partagé par la romancière Minna Sif, qui vient de publier "Massilia Blues" (éditions Alma) et est intervenue dans un atelier d’écriture pour les rappeurs, à la cité de la Busserine (14e arrondissement).

"Le programme est vidé de toute essence marseillaise. Les acteurs principaux de la vie culturelle locale ont été tenus à l’écart et l’exemple du hip hop est le plus sidérant", s’insurge-t-elle, convaincue qu’"à Marseille, on a un rap intellectuel, politique, férocement tendre et comique". Et de conclure : "Pour moi, MP2013, ce n’est pas de la culture : c’est un parcours fléché pour touristes en goguette".

Tout aussi critique, la rappeuse Keny Arkana chante dans "Capitale de la rupture" : "Où est passée la ville du Bled ? Paraît que ce temps est révolu. Capitale de la culture européenne... Si c’était une blague, c’est sûr on ne l’aurait pas cru !". Elle dénonce notamment le ripolinage du centre-ville et les expulsions d’habitants modestes du quartier de la Joliette, où ont été installés certains des lieux phares de MP2013.

"Elargissement esthétique"

Le hip hop n’est cependant pas absent de la programmation de cette année 2013, plaident ses organisateurs. "Nous, nous parlons de cultures urbaines dans un sens plus large, explique Claire Andries, en charge de la programmation de MP2013. Cela comprend aussi des graffeurs, des artistes contemporains. Nous avons travaillé sur une hypothèse d’élargissement esthétique".

Mme Andries met en avant "Watt !", un projet de résidences croisées de musiciens arabes, américains et français issus des cultures hip-hop mais aussi électro et jazz. "On a essayé de travailler avec des artistes du territoire mais aussi nationaux et internationaux", souligne-t-elle.

Toutefois, bien plus que d’être peu associés à la programmation de MP2013, les rappeurs marseillais regrettent que cette année particulière n’ait pas été l’occasion de créer dans la ville un lieu pérenne dédié au hip hop.

Une idée qui avait été évoquée lors de la préparation de la candidature de la ville, explique Akhenaton.

"On avait été approchés pour soutenir la candidature de la ville et on l’avait fait volontiers. On avait un projet qui devait rassembler tous les groupes marseillais qui ont une audience nationale et aussi d’autres groupes, une sorte de maison du hip hop qui aurait permis notamment des soirées micro ouvert, pour redynamiser ce qui a fait le succès de Marseille il y a quelque temps", raconte-t-il.

"C’était le minimum que Marseille pouvait faire, vu le nombre de lieux dédiés à l’opéra et aux statues en papier mâché qui existent", se moque le rappeur, avant d’expliquer que les organisateurs n’ont finalement pas retenu le projet.

Début février, la polémique a été relancée par une subvention de 400.000 euros accordée par la mairie à un concert payant du DJ David Guetta, qui doit avoir lieu en juin.

Pour le collectif d’artistes Alter Off, "cet argent devrait être utilisé pour soutenir la création locale, et pour des projets qui resteront après 2013", alors que le tissu associatif marseillais s’étiole faute de moyens.

Sur internet, une pétition lancée contre cette subvention avait recueilli mercredi plus de 30.000 signatures.

[Source : NouvelObs]

Le Tableau Noir, un squat générateur de culture
Poussez les portes du 64, rue Saint-Savournin, dans le 1er arrondissement de Marseille…

Galia, Laurent, Denis, G… les membres du collectif Tableau Noir

Ici, dans cette école abandonnée, des squatteurs se sont installés pendant cinq mois. Ils ont baptisé l’endroit le Tableau noir.
Dès la première semaine, ils ont choisi de s’ouvrir au quartier. Ils se sont proclamés « Centre social autogéré ». Et ils ont commencé à proposer une multitude d’activités, cours de langues, d’échec, de dessin, repas populaires, ciné-club, concerts à prix libres… Dans une Capitale de la culture où bien souvent, les habitants sont un peu oubliés au profit de l’institutionnel et de l’élitisme.
Mais ce n’est pas facile d’être acceptés quand on a des crêtes, des chiens et des piercings – le look parfait du punk anar’ – et surtout qu’on occupe illégalement un espace public, même abandonné. Les membres du Tableau Noir se sont heurté à l’incompréhension de certains riverains, et à celle des politiques locaux.
Ils ont été expulsés à la mi-mars 2013… Ils auront peut-être permis l’accélération des travaux d’une nouvelle école maternelle, dont Marseille a bien besoin. Et ils le promettent, ils recommenceront. Ailleurs. Ici, ce ne sont pas les bâtiments désaffectés qui manquent.

[Source : Anais & Magali]

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