[ [ [ Chantage politique d’un proviseur sur un lycéen engagé - Yannis Lehuédé

Le 16 juin 2009, Tristan Sadeghi, élève en première, tente de se réinscrire au lycée Maurice Ravel pour son année de terminale. Mais, surprise, on lui refuse son dossier sur ordre du proviseur. Philippe Guittet, proviseur de ce lycée du 20e arrondissement de Paris, tient à ce que cet élève s’engage par écrit à « ne plus organiser » de blocage de son lycée pour pouvoir être réinscrit. Il invoque un « trouble inacceptable » mettant en péril la « sécurité des élèves » et affirme que « les personnels eux-mêmes craignent pour leur intégrité physique face à l’utilisation de barrières de chantiers par les manifestants ». « Ces mêmes personnels qui, aujourd’hui, soutiennent Tristan, malgré les armes de destruction massive déployées » explique la Conseillère de Paris Danielle Simonnet (Parti de gauche). Dans un courrier, elle écrit : « Cette situation et la pression psychologique exercée sur l’élève et ses parents, nous parait insupportable et inacceptable. Elle est révélatrice d’un contexte ambiant de criminalisation de la contestation sociale. Comment un chef d’établissement a-t-il pu se sentir autorisé à enfreindre ainsi les règles de fonctionnement de l’éducation nationale et la démocratie lycéenne ? »

Pour Tristan, il s’agit d’une situation aussi inacceptable qu’incompréhensible. « On était deux-cent élèves à bloquer, et quatre représentants, je ne comprends pas. » Il est pourtant le seul à subir le chantage du proviseur, pour un mouvement contre les réformes Darcos, auquel il a participé. Dans la lettre adressée à son père, le proviseur le qualifie de « récidiviste », puisqu’il a déjà participé à des mouvements lorsqu’il était en seconde. Philippe Guittet explique : « Je ne lui demande pas de renoncer à avoir des idées sur le fond et sur les réformes. Je lui demande de renoncer à mener des actions illégales et illégitimes ». S’il confond les mots “illégal” et “illégitime”, c’est bien qu’il opère un jugement politique sur les actions du et des lycéens. Car dire que tenir des piquets de grève devant un lycée est illégal, c’est vrai, dire que c’est illégitime, c’est soit avoir séché ses cours de philosophie en terminale pour confondre ces deux mots, soit être en désaccord politique avec le fond et non la forme du mouvement.

Tristan, son père, Danielle Simonnet et une professeure syndiquée du lycée ont été reçus par un inspecteur d’académie qui a indiqué qu’il contacterait le proviseur du lycée Maurice Ravel afin de trouver une solution à la réinscription de Tristan. Cependant, il ne désavoue pas la décision du proviseur.

Philippe Guittet s’est fait connaître par sa phrase choc : « Le problème du lycée, c’est qu’il y a les lycéens... » Il semble avoir trouvé la solution.

Frédéric L.I.

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