[ [ [ La Coordination des intermittents et précaires doit être relogée - Yannis Lehuédé

La CIP-IDF, ainsi que d’autres collectifs et personnes intéressées, appellent à signer et à faire signer une pétition exigeant le relogement :

Nous avons besoin de lieux pour habiter le monde

Pour soutenir cette initiative, merci de faire circuler, de publier
et de faire publier l’information sur des blogs, des sites, etc.

La coordination des intermittents et précaires (http://www.cip-idf.org/) exerce depuis sa création, lors du refus de la contre-réforme de l’assurance-chômage en 2003, une fonction de centre social pour des intermittents du spectacle, des chômeurs et des salariés précaires.

Pour que cette fonction collective - toujours plus nécessaire en ces temps de précarisation et de contrôle social - puisse continuer à s’exercer, nous avons besoin d’un lieu adapté à notre activité. Or, la coordination est aujourd’hui menacée d’expulsion par la ville de Paris. Le Maire a été interpellé publiquement à plusieurs reprises, sans résultat jusqu’alors. De nouvelles actions contre cette menace se préparent avant un procès qui aura lieu le 9 mars.

La CIP-IDF, ainsi que d’autres collectifs et personnes intéressées, appellent à signer et à faire signer une pétition exigeant le relogement :

Nous avons besoin de lieux pour habiter le monde

Pour soutenir cette initiative, merci de faire circuler, de publier
et de faire publier l’information sur des blogs, des sites, etc.

NOUS AVONS BESOIN DE LIEUX POUR HABITER LE MONDE

À l’été 2003, le mouvement des intermittents et précaires s’opposait massivement à une restructuration de l’assurance-chômage instaurant un principe de capitalisation individuelle des droits sociaux. Profondément excluante et inégalitaire, cette contre-réforme visait à détruire le principe de mutualisation des ressources qui, à travers les annexes 8 et 10 de l’UNEDIC, caractérisait jusque-là l’intermittence.

Les intermittents et précaires font grève dans de nombreux festivals (notamment à Avignon), manifestent, s’invitent sur le plateau du JT de France 2, occupent des ministères, le Medef, l’Unedic... C’est dans ce contexte que le 14 quai de Charente est obtenu de la Mairie de Paris en novembre 2003. Dans le prolongement de ce refus initial de l’individualisation et de la concurrence de tous contre tous, cet espace est devenu, par la force des choses, un point d’appui pour diverses formes d’action, de pensée, d’accueil, de fabrication ; il est un lieu de lutte et de convivialité, hors du circuit marchand.

Il abrite des permanences sociales d’information et de défense des droits auxquelles se sont adressés, pour l’heure, plus de 3000 intermittents, chômeurs et précaires. Autant de pratiques d’entraide à partir desquelles s’engagent des initiatives collectives face aux institutions (CAF, Pôle emploi) et aux employeurs. Dans un contexte d’insécurité sociale croissante, ces permanences permettent de débloquer des centaines de dossiers litigieux, de faire respecter des droits, d’annuler des « indus » et des radiations. En lien avec d’autres collectifs, la coordination contribue à une campagne d’actions qui vise à enrayer la machine à précariser que constituent la mise en place de Pôle emploi et l’instauration du RSA.

Depuis trois ans, une Université Ouverte s’y invente, centrée sur l’analyse du néolibéralisme, ainsi qu’une recherche collective à laquelle sont associés des chercheurs, sur les mutations et les enjeux de l’intermittence et de la précarité. Des films y sont conçus et réalisés. Il abrite également une cantine, des cours de sport, une bibliothèque, des concerts, des projections, des lectures... Le prix libre et la gratuité sont de principe. De multiples collectifs en lutte s’y réunissent, s’y organisent et s’y côtoient : travailleurs sociaux, féministes et anti patriarcaux, sur le refus de l’enfermement, contre culturels, de lutte contre le racisme et les discriminations, compagnies de théâtre, de résistance à la criminalisation, antifascistes, media alternatifs...

Alors que les structures syndicales peinent à prendre en compte les besoins et les aspirations d’un précariat en expansion, ce lieu fait figure, mutadis mutandis, de nouvelle Bourse du travail, une Maison des précaires - des étudiants aux sans-papiers - où se créent des formes d’auto-organisation. Ce lieu de coopération sociale, politique, culturelle, est aujourd’hui un creuset d’expériences, de pratiques et de rencontres où des transversalités s’inventent quand tout travaille à établir des séparations.

La Mairie de Paris motive l’expulsion de la Coordination par l’aménagement de la ZAC Claude Bernard, au coeur d’un gigantesque projet urbain de 200 hectares, qui fait la part belle aux bureaux et aux logements privés et « intermédiaires » réservés aux classes moyennes et aisées. Après avoir proposé deux solutions de relogement qui ne permettaient pas le maintien a minima des activités existantes, la Ville de Paris assigne la CIP-idf au tribunal. À l’instar des chômeurs menacés de radiation dès lors qu’ils osent refuser deux « offres raisonnables d’emploi », même dans des conditions dégradées et sous payées, il faudrait, sous la menace d’une expulsion et de lourdes pénalités financières, se montrer, là aussi, raisonnables et accepter des propositions aussi inadéquates qu’impératives.

Dans cette ville de riches où vivent tant de pauvres, la municipalité finance des projets coûteux et de « prestige » tels le 104 rue d’Aubervilliers ou la future Halle Pajol. Mais elle n’aurait ni les moyens ni la place de concéder aux intermittents, aux chômeurs et aux précaires des lieux d’organisation et d’activités, ouverts à tous ?

Nous savons qu’il n’en est rien et que c’est affaire de décision politique.

Nous nous opposons à la mise à mort de cette expérience de fabrication et de partage . La Coordination des Intermittents et Précaires ne doit pas être expulsée sans un relogement qui permette le maintien et le développement des activités en cours.

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