[ [ [ HADOPI censurée par le conseil constitutionnel, un sage affront pour une loi (...) - Yannis Lehuédé

Le conseil constitutionnel a censuré la loi HADOPI, instaurant une police plus forte du net et luttant contre le téléchargement, mercredi 10 juin. Selon le conseil, saisi par les députés socialistes, la loi bafoue un certain nombre de libertés fondamentales.

Considérant qu’“Internet est une composante de la liberté d’expression et de consommation”, et qu’“en droit français c’est la présomption d’innocence qui prime”, le conseil rappelle dans sa décision que “c’est à la justice de prononcer une sanction lorsqu’il est établi qu’il y a des téléchargements illégaux”. (Voir sa décision complète).

Le conseil estime que le projet de loi HADOPI viole deux articles de la déclaration des droits de l’homme de 1789. L’article 9 et l’article 11.

« 12. Considérant qu’aux termes de l’article 11 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 : “La libre communication des pensées et des opinions est un des droits les plus précieux de l’homme : tout citoyen peut donc parler, écrire, imprimer librement, sauf à répondre de l’abus de cette liberté dans les cas déterminés par la loi” ; qu’en l’état actuel des moyens de communication et eu égard au développement généralisé des services de communication au public en ligne ainsi qu’à l’importance prise par ces services pour la participation à la vie démocratique et l’expression des idées et des opinions, ce droit implique la liberté d’accéder à ces services. »

« 17. Considérant, en outre, qu’en vertu de l’article 9 de la Déclaration de 1789, tout homme est présumé innocent jusqu’à ce qu’il ait été déclaré coupable ; qu’il en résulte qu’en principe le législateur ne saurait instituer de présomption de culpabilité en matière répressive. »

“Seul le titulaire du contrat d’abonnement à Internet pouvait faire l’objet des sanctions instituées”, dénonce le conseil. Or, “pour s’exonérer, il lui incombait de produire des éléments de nature à établir que l’atteinte portée au droit d’auteur procède de la fraude d’un tiers”, ce qui institue “une présomption de culpabilité” que le conseil constitutionnel ne juge pas acceptable. “Le rôle de la Haute Autorité (Hadopi) est d’avertir le téléchargeur qu’il a été repéré, mais pas de le sanctionner”, conclut le Conseil. C’est pourquoi il a validé la partie du dispositif qui permet à l’Hadopi d’envoyer des messages d’avertissement aux téléchargeurs.

Christine Albanel ne veut pas renoncer et a annoncé qu’elle voulait “compléter rapidement la loi Création et Internet pour confier au juge le dernier stade de la ‘réponse graduée’”. La loi devra repasser devant le parlement. Elle a aussi annoncé que “la mise en place de la Haute Autorité (...), exclusivement chargée du volet préventif de la lutte contre le piratage, se fera selon le calendrier prévu” et que “les premiers messages d’avertissement seront adressés dès l’automne aux abonnés à Internet”. Pour la ministre, Internet n’est pas un droit fondamental ; le conseil semble estimer le contraire. Rappelons que la ministre a annoncé au Talk Orange-Le Figaro qu’elle démissionnerait si le texte ne passait pas.

Frédéric L.I.

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